mardi 31 août 2021

Seule dans Raqqa, de Hala Kodmani

 

Ce livre est le récit, au jour le jour ou presque, du combat de Nissan Ibrahim, professeur de philosophie syrienne, contre la dictature qui sévit dans son pays.

Nissan est active et militante sur Facebook et y relate ce dont elle est témoin, entre 2011 et 2015. On y lit l’évolution de la condition de la femme en Syrie, entre la dictature de Bachar Al-Assad et celle instaurée par la suite par l’État Islamique.

D’un point de vue littéraire, ce n’est pas forcément excellent, mais l’essentiel, dans ce type de livre, n’est pas là. Nissan – c’est un pseudonyme, bien sûr – est une insoumise qui si, pour des raisons de sécurité, n’a pas participé physiquement aux manifestations qui se déroulaient tout près de chez elle, les a suivies et relayées sur les réseaux sociaux, comme l’aurait fait un média politique, une sorte de « base arrière » de la révolte. Ses prises de position, malgré l’anonymat – relatif – des réseaux sociaux, lui vaudront de devoir se cacher afin de se protéger, ainsi que sa famille. Que ce soit contre la dictature de Bachar Al-Assad ou l’État Islamique, le peuple Syrien lutte pour conserver et/ou retrouver la liberté.

A l’heure où les Talibans reprennent le pouvoir en Afghanistan et y installent une autre dictature (qui ressemble beaucoup à ce que vivent les Syriens depuis l’arrivée de l’EI dans leur pays), Nissan et les autres résistants, dont beaucoup, comme elle, paient leur insoumission de leur vie, nous rappellent par leurs témoignages que la liberté de penser, de culte, de mouvement… est un bien qu’il nous faut chérir, quitte à devoir se battre pour l’obtenir et la conserver.

Nissan Ibrahim a disparu de Facebook à la fin de l’année 2015. Et Daech (autre nom de l’État Islamique) a annoncé son exécution en janvier 2016. Elle avait trente ans.

Paru aux éditions Équateurs, 2017. - ISBN : 978-2-84990-478-7.


lundi 30 août 2021

Drame en trois actes, d'Agatha Christie


Sir Charles Cartwright a invité plusieurs personnes à dîner dans sa maison baptisée « Le Nid de Corneilles », au sommet d’une colline surplombant le port de Loomouth. Parmi les invités se trouvent M. Satterthwaite, Miss Hermione « Egg » Lytton Gore et sa mère, Lady Mary, mais aussi un psychiatre, Sir Bartholomé Strange, ainsi que le célèbre détective Hercule Poirot.

Juste avant le dîner, M. Stephen Babbington, pasteur de Loomouth invité, lui aussi, avec son épouse, a la très mauvaise idée – et le mauvais goût aussi, il faut bien le dire, - de s’effondrer, raide mort, alors qu’il prenait, comme tous, l’apéritif. L’enquête conclut à une mort naturelle, mais cette mort devient suspecte quand, peu de temps après, Sir Batholomé Strange succombe, lui aussi, dans des circonstances analogues.

Sir Charles, Miss Lytton Gore et M. Satterthwiate commencent alors leur enquête, secondés, à distance, par Hercule Poirot…

Les romans d’Agatha Christie me plaisent toujours autant ! L’ambiance, les intrigues, l’humour, les crimes, les criminels, Hercule… (oui, je sais, on a vu plus glamour comme héros, mais… que voulez-vous, j’ai un faible pour lui ! Et j’ai du sang belge dans les veines. Ceci explique peut-être cela?).

Bref. Ce roman est fidèle au style d’Agatha Christie, avec des références incessantes au théâtre, tant dans la construction du récit (trois « actes », correspondant aux meurtres de l’intrigue), que dans la présentation (le roman s’ouvre sur la liste des personnages, comme dans une pièce de théâtre), et plusieurs personnages sont acteurs ou écrivent des pièces de théâtre, ce qui plonge le lecteur dans cette ambiance particulière où les personnages jouent un rôle… Mais je n’en dirai pas plus, pour ceux qui ne connaîtraient pas encore !

Comme d’habitude, je n’ai pas pu m’empêcher de prendre ce roman dans la bibliothèque de mes parents ! C’est d’ailleurs pour cela que l’édition que j’ai entre les mains n’est pas récente du tout… Tiens, un jour, je ferai le tri dans ma propre bibliothèque et leur rendrai ce qui leur appartient : ça me fera sans doute plus de place pour y ranger mes propres livres !

Paru aux éditions Librairie des Champs-Elysées, 1949 (Club des Masques). ISBN : 2-7024-1339-0.

samedi 21 août 2021

La Servante écarlate, de Margaret Atwood

 

J’avais entendu parler de « La Servante écarlate » par la série sortie sur Netflix et j’en avais eu de très bon échos (sans pouvoir la visionner : je ne suis pas abonnée à Netflix!). Le sujet m’intéressait et, encore une fois, je n’ai pas été déçue du voyage (c’est ce qui est bien, quand on ne suit pas les modes en matière de lecture : le temps se charge de sélectionner les livres qui valent le coup de perdurer…).

Ici, il s’agit d’un récit à la première personne. Une femme, anonyme (on ne connaîtra jamais son nom de « servante » et jamais sa véritable identité), raconte sa vie quotidienne à Galaad, le monde qui a remplacé la société américaine, à une époque indéterminée, à la frange du XXe siècle. Cette femme fait partie de celles qui ont connu le « monde d’avant », ont vécu le changement de régime et sont sommées de s’adapter au nouveau. Et ce nouveau monde est effrayant.

Je ne ferai pas ici l’injure aux lecteurs de ce blog du « pitch » du roman plus que les quelques lignes qui précèdent. Étant donné le nombre d’éditions, de traductions, de films, et maintenant la série qui en est tirée, je laisse au lecteur qui veut en savoir plus le soin de se renseigner. Ce que je peux dire, en revanche, c’est que j’ai dévoré ce récit, une dystopie dans la lignée de « 1984 », « Le Meilleur des Mondes » ou « Farenheit 451 », trois ouvrages que j’ai lus il y a des années et dans lesquels il faut vraiment que je me replonge, au vu de ce qui se passe en ce moment. Ces trois livres semblent d’ailleurs être à l’origine de celui de Margaret Atwood, tant ils l’ont marquée, elle aussi.

J’ai donc lu très vite « La Servante écarlate » et suis rentrée dans ce monde étrange où la dictature, comme souvent, se présente comme la solution aux problèmes du monde et créant de ce fait un avatar effrayant, une sorte de matrice de ce que pourrait être notre monde si on laisse s’y développer certaines choses.

En ce sens, « La Servante écarlate », bien que sortie en 1985, est un livre très actuel. Intemporelle, faisant référence à de grands défis des années 1980, cette histoire pourrait très bien avoir été écrite pour ce premier quart du XXIe siècle. Entre pandémie, réchauffement climatique, transhumanisme et théorie du genre, il y a largement de quoi imaginer une autre dystopie, qui ne serait sans doute pas moins effrayante que celle décrite par Margaret Atwood. Les faits qu’elle imagine, les réactions humaines sont parfaitement plausibles, parce qu’observés par le passé à chaque période difficile. Les ressorts totalitaires semblent être toujours les mêmes, seules les cibles changent : là, les Juifs ; ici, les femmes ; ailleurs, les personnes de couleur… l’imagination humaine, en matière de répression et de persécution, semble n’avoir aucune limite. Si seulement elle se limitait à l’écriture romanesque !

« La Servante écarlate » est un roman magistral, et nécessaire !

Paru aux éditions Robert Laffont, 2021 (Pavillon Poche). - ISBN : 978-2-221-24994-9.

mercredi 18 août 2021

Six X = zéro, de Robert Beauchamp


J'ai mis du temps à lire ce livre. Non pas qu'il soit difficile, bien au contraire, mais il était chez mes parents et je n'avais pas eu le temps, la dernière fois que j'y étais allée, de le terminer. Et comme il y a eu cette pandémie (non ! Vous n'avez pas pu oublier !!!!!), je n'y suis pas retournée tout de suite, malheureusement.

Enfin bref, j'ai enfin eu le temps de le lire. Et je me suis bien amusée !

Le personnage principal de ce roman policier est un certain Bertrand, commissaire de son état, et surtout Comte de Solignac. C’est à ce titre qu’il est invité par Lise Montbreuil, épouse snob mais sympa d’un polytechnicien de renom, André, qui organise chez elle un dîner avec quelques amis. Tous ces invités sont des « têtes », des scientifiques, chercheurs, militaires de carrière… sortis, comme leur hôte, de l’école Polytechnique (que l’on appelle aussi « L’X ») et de grands noms Français. Pour faire bref, ils « naviguent » dans les hautes sphères de l’État et y tiennent un rôle majeur, selon leurs spécialités respectives. Il y a donc, ce soir-là, autour de la table, Jacques Bouliez, qui vient d’entrer au conseil de la Banque de France, accompagné d’Aline, son épouse, ainsi que Michon, le haut-commissaire à l’Énergie atomique et sa femme ; Colson, professeur de mathématiques, accompagné de son épouse, le général Marcotte, directeur des services de recherches de l’armée de l’air, lui aussi marié. Sont également du dîner Marcel Landrieux, « grand manitou de l’électronique », dont la femme est grippée et c’est son absence qui a obligé Lise à inviter Bertrand afin que la table soit complète. Sont également de la partie Claude Martin, une femme médecin divorcée, ainsi que Edmond Cournot, physicien nobélisable, accompagné de sa fille adoptive Paule, elle aussi physicienne, qui l’aide et le soutient depuis que la polio a paralysé le bras du chercheur.

Tout ce beau monde passe une belle soirée, où le commissaire remarque toutefois certains faits étranges, qui l’aideront par la suite à résoudre l’énigme de taille qui se présente à lui très rapidement. Le lendemain du dîner, en effet, il reçoit un appel de Lise Montbreuil, plutôt affolée, qui a reçu une lettre anonyme l’informant que, « avant un mois, 6 X = 0 ». Femme de polytechnicien, ayant reçu, la veille, plusieurs polytechniciens, Lise comprend que ses hôtes et son mari sont menacés de mort… Les faits lui donnent raison, puisque, très vite, plusieurs d’entre eux succombent dans d’étranges circonstances. Il faudra toute la sagacité et le courage de Bertrand de Solignac pour résoudre l’énigme et trouver le – ou les – coupable(s) de ces meurtres odieux...

Robert Beauchamp est un pseudonyme. Je l'ai découvert en faisant quelques recherches sur ce livre un peu ancien que j'ai emprunté chez mes parents lors de mes vacances d'été. L'auteur est en réalité une femme, Jeanine Delpech, qui avait pris plusieurs pseudonymes en fonction du type de livres écrits. Pour les romans policiers, il s'agissait donc de celui de Robert Beauchamp.

J’ai dévoré ce roman. Paru en 1971, il est donc assez ancien, mais j’aime bien, justement, ces livres parfaits pour les vacances d’été, où l’on peut se détendre avec une histoire sympa, pas trop compliquée pour les neurones fatigués de la vacancière que je suis parfois. Piocher dans la bibliothèque familiale permet aussi de faire souvent de belles découvertes, et celle-ci en est une, même si je doute qu’il soit facile, aujourd’hui, de trouver encore ce livre… Peut-être en bibliothèque ? En tout cas, c’est bien écrit, l’intrigue est intéressante, menée de façon tout à fait honorable et regorge de rebondissements. Une histoire à tiroirs, donc, avec une multitude de personnages secondaires qui permettent de plonger dans des mondes aussi différents que celui, très chic, des « élites » parisiennes ou celui des personnels de maison, ces serviteurs invisibles qui, pourtant, savent tout ou presque de leurs maîtres. C’est l’interaction entre ces deux mondes qui est fort bien décrite ici, et qui forme en quelque sorte le rouage essentiel du récit.

Paru aux éditions Librairie des Champs Elysées, 1971 (Le Masque n°1169).