jeudi 16 mai 2013

La Forêt des Mânes, de Jean-Christophe Grangé


Changement brutal, de lieu, d'ambiance, de ton, de style, avec ce second roman policier sorti du même carton que Le Meurtre de Roger Ackroyd. Ici, le ton est sec, rapide, les phrases parfois lapidaires, voire inexistantes dans leur forme classique, avec un sentiment d'urgence qui pointe à chaque ligne. Effet de style, l'auteur utilise les phrases nominales pour décrire les situations dans lesquelles il place ses personnages, comme pour mieux plonger le lecteur dans l'urgence et le stress de l'enquête. Et ça fonctionne plutôt bien.

Jeanne Korowa est une juge d'instruction parisienne de 35 ans. Elle est dépressive, vit seule, mange peu, est carencée et névrosée... mais compétence. Une affaire financiaro-politique lui est confiée, mais elle se laisse vite déborder par ses ennuis personnels et franchit les lignes déontologiques que son métier lui interdit de transgresser... De toute façon, cette enquête ne l'intéresse pas plus que cela. Celle sur laquelle son collègue François Taine travaille, en revanche, l'interpelle grandement et justifie à ses yeux les nombreuses entorses qu'elle fait aux règles qui prévalent dans son métier.

Le roman est construit en trois parties. Dans la première, le lecteur assiste à l'enquête « officielle » et aux débordements de l'héroïne. Pour ma part, j'ai trouvé cette partie un peu agaçante dans la mesure où Jeanne semble dotée de tous les pouvoirs, de tous les droits, et, surtout, de toutes les capacités. C'est un peu une héroïne de bande dessinée façon « vengeur masqué », loin des personnages que l'on rencontre d'habitude dans les romans policiers.
Dans les deuxième et troisième parties du roman, on bascule carrément dans le roman d'aventures et, pour le coup, même si c'est encore plus abracadabrantesque qu'au début, au moins, j'ai eu le sentiment que l'auteur assumait le caractère et les frasques de son héroïne (ou peut-être me suis-je attachée à elle entre les deux ?). Toujours est-il que j'ai apprécié ce côté aventureux, même si j'ai eu l'impression d'un certain manque de crédibilité parfois...
86 chapitres au total, mais heureusement pour moi, en cette période de grande fatigue, ces chapitres sont très courts et le rythme est rapide, tant celui du récit que celui de la langue. Aucun risque, donc, de s'endormir.
Malgré les quelques petites réserves évoquées plus haut, j'ai été bluffée devant les recherches que ce livre doit avoir nécessité. On en apprend pas mal sur, pêle-mêle : l'Amérique latine, l'autisme, la psychanalyse, les conflits internationaux, les juntes militaires dans l'histoire sud-américaine, le cannibalisme, la génétique, l'anthropologie, voire la paléo-anthropologie... Oui, j'ai pris plaisir à découvrir ces univers, même si c'est finalement au travers d'un périple assez improbable.
Au final, ce roman, sans être un coup de cœur, est quand même un très bon divertissement, que j'ai eu beaucoup de mal à lâcher pour dormir durant les deux jours qu'il m'aura fallu pour « dévorer » les 628 pages...

Paru aux éditions LGF, 2011 (Le Livre de Poche). ISBN : 978-2-253-15848-6.

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