Il y a un
peu plus d'un an, je crois, j'ai hérité d'une partie de la
bibliothèque d'une parente plutôt éloignée (la mère du mari de
la sœur de ma mère !). Dans cette bibliothèque, j'ai trouvé ce
livre, sur un thème très éloigné de ceux auxquels je m'intéresse
habituellement (policiers, vies de saints, bandes dessinées...). Là,
il s'agit d'un roman historique américain. Alors je n'ai pas fait de
recherches poussées, mais il semble que ce livre soit basé sur une
histoire vraie.
La Grande
Sultane, appelée aussi la Validé, dans la tradition ottomane
(turque), est la mère du Sultan au pouvoir. En tant que mère du
Sultan, elle détient un pouvoir gigantesque sur toutes les femmes du
harem de son fils et est appelée « Reine des têtes voilées ».
Elle règne donc sur cet empire de femmes, pendant que son fils règne
sur son pays.
Dans ce
livre, nous suivons Naksh-i-dil, une jeune fille de quinze ans au
début du roman, vendue comme esclave au Sultan Abdul-Hamid, qui en
fera sa favorite et à qui elle donnera un fils, Mahmud, qui
deviendra sultan à son tour sous le nom de Mahmud II. Le tout après
bien des péripéties, complots, embrouilles et meurtres.
J’ai été
captivée par ce roman. Non pas tant pour l’intrigue elle-même,
qui est l’histoire de cette jeune fille vendue comme esclave, qui
vit dans cette prison dorée qu’est le harem du sultan, puis dans
la véritable prison des femmes à la mort de celui-ci, pour revenir
au harem proprement dit au moment du couronnement de son fils, où
elle aura tous les pouvoirs tout en restant à jamais prisonnière,
que pour ce que j’ai appris de ce monde musulman ottoman et de son
fonctionnement si éloigné de notre pensée occidentale.
Par
certains côtés, ce monde turc de la fin du XVIIIe siècle et du
début du XXe siècle (Naksh-i-dil est morte en 1817) est très dur,
sous des apparences luxueuses, voluptueuses, où les richesses
affluent et semblent faire rêver. J’ai découvert là un monde où
tout, finalement, n’est qu’apparence, où tout peut s’arrêter
du jour au lendemain (à la mort du Sultan en particulier)… où les
richesses appartiennent à des femmes esclaves, où la corruption et
les arrangements règnent en maîtres et où, finalement, le sultan
lui-même est prisonnier de son rang, de sa position, du rôle qu’il
est sensé jouer…
Si j’ai
bien compris, l’histoire n’a retenu de la jeune créole que son
nom de harem, Naksh-i-dil, mère du Sultan Mahmud II. Mais la
personne a bien existé, ainsi que son fils, considéré comme le
premier sultan progressiste en Turquie. Peut-être est-ce dû au fait
que sa mère était chrétienne, et non musulmane, et que si elle a
embrassé l’Islam, c’était bien plus dans le but de survivre que
pour une question de foi… du moins au départ.
Le lecteur
croise aussi dans ce roman Catherine II de Russie et Napoléon, qui
se font la guerre tout en faisant de la Turquie à la fois un enjeu
et/ou un allié potentiel… Je ne suis pas très versée dans les
questions de géopolitique et, clairement, ce n’est pas cet aspect
qui m’a le plus intéressée dans ce récit. Et puis, j’ai trouvé
cette partie un peu confuse. Je n’ai retenu que le fait que
Catherine II, vieillissante, avait elle aussi un certain nombre de
favoris… Les enjeux de pouvoir sont souvent liés à la séduction…
Ce que
j’ai apprécié, en revanche, c’est la plongée dans cet univers
très codé, très hiérarchisé, et surtout très fermé du harem,
pour lequel mon niveau de connaissances avoisinait le zéro pointé.
Je pourrais mentionné aussi le fait que ce livre montre à quel
point les enjeux du pouvoir peuvent être cachés et, surtout, que le
pouvoir réel n’est pas dans les mains de celui qui semble en être
officiellement le détenteur… La place des eunuques dans ce tableau
est pour le moins frappante dans ce domaine !
Une bonne
découverte, donc, d’autant que le style littéraire est plutôt
agréable. Ce n’est pourtant pas une nouveauté, puisque ce livre a
plus de trente ans… mais je considère qu’il n’y a rien de
honteux à lire des livres anciens et à apprendre, fût-ce au
travers de romans ! Ils sont, la plupart du temps, extrêmement
bien documentés et mettent à la portée du néophyte des notions et
des connaissances souvent très pointues.
Paru
aux éditions du Club France Loisirs, 1988. ISBN : 2-7242-3964-4.
Première
édition en France : Albin Michel, 1987.
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