Cet
ouvrage, je l'ai lu en deux temps. Tout d'abord, il y a deux ans,
lors de la reprise de mes études en théologie à l'université de
Strasbourg, pour une fiche de lecture. A cette occasion, j'ai lu le
livre de Romano Guardini, plus court que le premier (celui du
Cardinal Ratzinger). D’autre part, il s'agit du livre qui a inspiré
à Joseph Ratzinger l'écriture de son livre auquel il donne le même
titre. Je voulais alors retourner aux « sources ».
Ce premier
ouvrage a été écrit au début du XXe siècle, traduit en français
en 1930. Donc avant la réforme liturgique initiée par le Concile
Vatican II, au début des années 1960. Je pensais y trouver des
réponses à mes questions, mais j’ai été déçue de ce point de
vue. Le livre de Romano Guardini parle de liturgie, bien sûr, mais
de manière à en donner le sens, la signification en tant que telle.
Et non pas la signification des gestes, paroles, moments, lieux. J’ai
beaucoup appris à la lecture de ce livre mais en ai retenu peu de
choses, non pas parce qu’il est inintéressant (au contraire), mais
parce qu’il est désormais trop éloigné de ce que je vis en tant
que fidèle lorsque j’assiste à la messe. D’autant plus que je
n’avais pas les « clés » pour comprendre ce qu’il
disait et qu’il parlait, fort logiquement, de la liturgie telle
qu’elle était célébrée avant le Concile. Il faudrait donc que
je le relise, maintenant que j’ai lu celui de Joseph Ratzinger.
En effet,
le livre de celui qui deviendra le pape Benoît XVI par la suite est
très différent, même s’il parle, finalement, de la même chose.
Tout d’abord, le Cardinal Ratzinger a un style littéraire (même
traduit de l’allemand au français) bien plus facile à lire que
celui de Romano Guardini ou d’un autre pape comme Jean-Paul II par
exemple. Le propos est clair, construit de manière logique et
cohérente, avec un vocabulaire accessible au commun des mortels (il
n’y a pas besoin d’avoir fait de la théologie pour comprendre),
avec un plan simple à suivre et à comprendre. Ratzinger sait où il
veut aller et emmener le lecteur et cela se sent dans sa manière de
composer un livre sur un sujet qui peut, de prime abord, sembler
plutôt aride ou difficile.
J’ai
donc lu, pour une autre fiche de lecture, dans le cadre du premier
semestre de la licence de théologie que j’ai entamée cette année,
cet ouvrage de Ratzinger qui, lui, répond parfaitement aux questions
que je me posais il y a deux ans. Comme quoi, j’aurais sans doute
du commencer par celui-là !
Dans ce
livre, en quatre parties, Ratzinger aborde la liturgie et sa
signification sous le double prisme des Écritures et de l’Histoire
sainte, l’un n’allant pas sans l’autre en ce domaine. Il en
donne, dans la première partie, une signification spirituelle qui
rappelle ce que disait Guardini. Dans la deuxième partie, il aborde
les questions du temps et de l’espace dans la liturgie. C’est
dans cette partie notamment qu’il parle de la question du lieu où
l’on prie, de l’histoire des églises, mais surtout de leur
agencement intérieur, de leur orientation, et qu’il donne la
signification du bâtiment, de l’autel, de la réserve
eucharistique et du calendrier liturgique. La troisième partie est
consacrée à l’art dans la liturgie, et Ratzinger en fait un
cheminement historique tant en ce qui concerne l’image que la
musique. La dernière partie est consacrée à la forme de la
liturgie elle-même : le rite et tous les gestes qui le
composent, où une part très importante est laissée à la place du
corps et de la manière dont il est utilisé pour prier.
Ce livre
m’a permis de mieux comprendre ce qui se passe durant la messe
(sans en épuiser le mystère, bien entendu), afin de mieux y entrer,
de mieux la vivre aussi. Une lecture ne suffit pas, bien sûr, mais
c’est déjà une première approche qui m’aide beaucoup dans ma
pratique personnelle. Ne serait-ce que comprendre pourquoi on se met
debout, à genoux ou assis durant la messe est une aide pour entrer
dans la profondeur du mystère qui se déroule sous nos yeux quand on
assiste à la messe. Rien que ça, c’est déjà un grand pas :
cela confirme certaines de mes intuitions et m’aide à y voir plus
clair. Par ailleurs, le futur Benoît XVI se montre plutôt critique
sur certaines des conséquences de la réforme liturgique voulue par
le Concile, non pas parce que cette réforme ne serait, selon lui,
pas juste ou utile, mais parce qu’elle a été très mal comprise
et donc très mal mise en œuvre. On s’est attaché à la forme en
perdant beaucoup du sens de la réforme (et donc de la liturgie). La
suite de sa vie, et notamment certaines de ses décisions en matière
de liturgie (mais on peut dire la même chose de Jean-Paul II et du
pape François) montrent que la question de la liturgie est loin,
très loin d’être figée ou close. Au contraire : l’Église
existe depuis deux mille ans et cela fait à peu près autant de
temps qu’elle se réforme en permanence...
Paru aux éditions
Artège, 2019. ISBN : 979-10-336-0919-3.