samedi 29 octobre 2016

À la fin le silence, de Laurence Tardieu

Cette année, j'ai pu participer à l'opération "Matchs de la rentrée littéraire", organisée par Price Minister, tous les ans depuis quelques années. Et suite à ma participation au tirage au sort, j'ai reçu le livre de Laurence Tardieu, "À la fin le silence".



J'ai été surprise par ce livre et, surtout, par les images qu'il a suscitées en moi. C'était assez étrange, parce que je visualisais des choses que j'avais envie de traduire sous forme de dessin. Or je suis... nulle en dessin. Eh oui. Et en plus, je suis aussi nulle en traitement d'images, en design et tout et tout. Du coup, je suis totalement coincée pour exprimer ici ce que j'ai vécu en lisant ce livre. Et c'est bien dommage, parce que j'aurais aimé traduire visuellement mes impressions. Au lieu de cela, il va falloir que je me contente des mots. Et là non plus, il faut croire que je ne suis pas très à l'aise. Comment, en effet, exprimer l'indicible, l'horreur, face au carnage, face aux meurtres sanglants qui sont en toile de fond de ce roman ? Comment, comment dire la fragmentation de la personne ?

Alors voilà. J'ai profité de cet article pour tester quelques fonctionnalités logicielles, afin de trouver une façon, pauvre, certes, mais reflétant un peu mon vécu devant cet ouvrage, pour le rendre visuellement accessible. Parce que ce sont réellement des images qui m'ont habitée en lisant ce livre. Et ces images se sont multipliées, complétées, superposées... au fil des mots, de ma lecture.


Le roman débute par le récit par l'auteur de la journée du 7 janvier. Celle qui a vu l'attentat meurtrier de Charlie Hebdo se dérouler en plein Paris, à quelques rues de l'appartement de l'auteur-narrateur. Et en lisant ces lignes, je ne pouvais m'empêcher de voir, de visualiser cette femme, déjà mère deux fois et enceinte, en plein milieu de la tourmente. Même si elle n'était pas directement concernée, la narratrice a "vécu" les attentats (celui du 7 janvier, mais aussi ceux du 9 janvier et, plus tard, ceux du Bataclan) comme si elle "y était". Sans doute est-ce dû à sa grossesse ? Toujours est-il que, même si elle n'était ni dans les locaux de Charlie Hebdo ni au concert du Bataclan, dans l'Hyper Cacher ou à la terrasse d'un des cafés pris pour cible, elle a vécu les attentats dans sa chair. Et, pour moi, ça s'est traduit par cette image, où je ne parviens pas à restituer ce que j'y ai vu : un corps et une identité morcelés, comme eux-mêmes victimes de la bombe et déchiquetés par l'explosion. Un corps et une identité éclatés...

Et puis, au fil du récit, on apprend aussi que la narratrice, avec sa famille, a décidé de vendre la maison de son enfance. Une maison sur les hauteurs de Nice, avec vue sur mer, où elle a passé et passe encore, au long de ce processus incroyable qu'est un grossesse, de bons et heureux moments. Une maison-refuge, un lieu paisible et reposant, seul endroit capable, pour elle, en ces temps troublés, de la rassurer, de la "réunifier" après l'éclatement des attentats. Vendre cette maison est donc un nouveau déchirement, tout aussi intérieur que le premier.

Dedans, dehors.


Et pourtant, cette personnalité doublement morcelée, porteuse d'une vie nouvelle, parvient peu à peu, mais pas sans peine, à surmonter les chocs successifs, les déchirements, les cassures, les blessures internes et invisibles pour tous.

Paradoxalement, c'est, semble-t-il, la naissance du bébé qui va l'aider à procéder à cette réunification intérieure, en apportant la paix à la "nouvelle" maman. Parce que c'est bien de cela qu'il s'agit : la naissance de cet enfant fait de cette femme une femme entièrement renouvelée, reconstruite malgré les blessures, les déchirures... 

J'ai été touchée. Parce qu'on ne peut pas rester indifférent devant les cris de douleur des victimes. Et parce qu'effectivement, une naissance est un événement à double détente : naissance d'un nouvel être humain, le bébé, mais aussi d'une nouvelle personne, la mère. Et même si elle est déjà mère, cette nouvelle naissance la renouvelle, la transforme... faisant d'elle un être différent tout en étant le même.

Je ne dirais pas que ce roman est mon préféré. Il était difficile, dur, avec souvent des répétitions, des tournures de phrases inhabituelles. Certes, les mots et les phrases sont travaillés, de manière à faire transparaître les émotions de la narratrice. Mais ces "artifices" rendent parfois la lecture compliquée à suivre. Heureusement que ce n'est pas le ressort principal du récit, sans quoi il aurait été impossible à comprendre.

En tout cas, c'est une bonne découverte, et je remercie Price Minister et Chapitre.com !

#MRL16

mardi 26 juillet 2016

Silo, de Hugh Howey



Mes collègues m'ont offert ce roman à la fin du mois de juin. D'habitude, quand on m'offre un livre, j'ai du mal à l'ouvrir si je n'en ai pas entendu parler ou si je ne l'ai pas repéré auparavant. Là, par curiosité, j'ai lu la première page... et je n'ai plus lâché le livre. Avec quatre enfants à la maison à temps plein (vacances obligent !), autant dire que c'est une performance et que j'ai beaucoup aimé. Parce qu'il y a plus de 600 pages quand même !

Alors cette histoire se passe vraisemblablement dans le futur. Vraisemblablement, parce qu'on n'a aucune indication de date dans tout le roman. Seulement des faisceaux d'indices permettant de situer l'intrigue plusieurs centaines d'années après un événement cataclysmique qui a obligé les survivants à vivre sous terre, dans un silo, afin de se protéger de l'atmosphère terrestre, devenue mortelle pour les êtres humains.
Cette communauté vit à la manière d'une fourmilière, chacun ayant sa tâche, son travail, et son « ombre », adolescent(e) chargé(e) d'observer son aîné(e) afin d'apprendre auprès de lui ou d'elle son futur travail. Ainsi, le silo peut continuer à fonctionner indéfiniment. La population est volontairement contrôlée drastiquement, pour éviter toute surpopulation, les candidats à la parentalité devant s'inscrire à la loterie. Le couple gagnant a un an pour avoir un enfant…
Toute une mythologie s'est également développée à l'intérieur du silo, avec en particulier un souci important de ce que devient la personne après sa mort. Et puis, il y a les lois mises en place, très sévères pour qui les enfreint. La plus lourde peine étant le « nettoyage », véritable condamnation à mort pour qui est pris à parler de l'extérieur ou à émettre des doutes quant aux décisions prises par les dirigeants du silo.
Seulement voilà, l'attrait de certains pour ce « dehors » est si fort que cela commence à provoquer des événements troublants, depuis le « suicide » d'une informaticienne jusqu'à celui de son shérif de mari, qui va d'ailleurs déclencher, à la manière d'une réaction en chaîne, une somme d'événements susceptibles de renvoyer le silo aux heures les plus sombres de son histoire, celles de la mythique Insurrection.

On est donc ici dans un vrai et bon roman de science fiction, qui dit énormément de choses sur la nature humaine, depuis la soif de liberté jusqu'à la volonté de comprendre, de vivre, de donner simplement un sens et du sacré à sa vie… Les personnages sont très bien campés, nuancés, attachants, et c'est toute une galerie de portraits que le lecteur rencontre, certains faisant froid dans le dos (le méchant est bien méchant, un vrai de vrai, même si, lui aussi, est décrit de manière humaine et nuancée), d'autres étant tellement sympathiques que l'on voudrait les suivre et les retrouver. Le silo lui-même est d'ailleurs un véritable personnage à part entière, avec ses mystères, ses secrets, ses zones lumineuses et sombres, son histoire mouvementée…

L'auteur sait manier le suspense et a construit ici une intrigue haletante, dans un monde horrible mais extrêmement cohérent. Le silo dévoile certains traits de l'humanité que nous connaissons tous, exacerbés par le huis-clos où ces hommes et ces femmes sont obligés de vivre : recherche et quête du pouvoir à tout prix, corruption, interrogations sur le sens de la vie, sur le pourquoi des lois qui régissent cette société en forme de microcosme, sur la transgression…
J'ai regretté d'être arrivée à la fin. Mais la bonne nouvelle, c'est que deux autres tomes sont parus : un « avant » et un « après » !


Paru aux éditions Actes Sud (Babel), 2014. ISBN : 978-2-330-03737-6

jeudi 21 juillet 2016

Les Pieuses combines de Reginald, de Thomas Hervouët



Voici un roman réjouissant ! Il met en scène cathos et athées, pour mieux cibler les travers des uns et les incohérences des autres…
Étant catholique moi-même, j'avais un peu peur. Mais comme le livre m'a été conseillé par une amie, catho elle aussi, je me suis dit que ça devait être sans danger. Et j'ai bien fait !

Reginald Le Vaillant est notaire. Marié à Blandine, fille du comte d’Époisses, il appartient à la frange catholique traditionnelle version « vieille France » de l’Église. Reginald et Blandine ont trois enfants, dont une fille, Athénaïs, qui est quelque peu au centre du roman (en fait, on n'entend tout bonnement jamais parler de ses deux frères). Athénaïs est étudiante aux Beaux-Arts et quasiment fiancée avec Elton Moulard, avocat et, surtout, représentant inénarrable de la gauche caviar la plus absolument anticléricale. Autant dire que la rencontre de ces deux mondes va faire des étincelles.
Mais voilà, on n'est pas dans le film « Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu » !

L'intrigue principale n'est pas là (quoique!). En fait, Reginald doit assurer la succession d'une comtesse, et s'assurer, selon les vœux de la défunte, que l'héritier qu'elle a désigné, Jean-Arthur Chambourcy, fils de sa filleule, est bien catholique pratiquant. Si tel est le cas, la fortune de sa bienfaitrice lui reviendra. Dans le cas contraire, elle ira à l’Église. Pour s'assurer de la foi du jeune héritier, la Comtesse a désigné le Père Magnifis, curé de la paroisse et potentiel héritier si le filleul ne fait pas l'affaire.
Face à l'évident conflit d'intérêt qui s'annonce, Reginald Le Vaillant se présente comme garant de la bonne marche de la succession. Et tout irait très bien… s'il ne s'était trouvé que l'héritier potentiel est peintre et… ami d'Athénaïs.
Reginald se retrouve donc en position de force et de faiblesse. À condition d'influer correctement sur le cours des événements, il pourrait bien régler d'un coup ses problèmes : celui du mariage de sa fille avec un prétendant qui ne lui plaît pas… et celui de la succession de la Comtesse. Seulement voilà : le jeune Chambourcy semble ne pas être prêt à coopérer, d'autant qu'il ne doit rien savoir de la succession sous peine de l'invalider totalement !

On est là dans le burlesque, la parodie, la farce. C'est parfois énorme, trop gros pour être crédible, mais on se laisse finalement prendre au jeu et ça fait du bien. Les personnages sont drôles et attachants, plutôt imprévisibles tout en correspondant parfaitement aux archétypes qu'ils représentent. Tous les petits travers des cathos, mais aussi des autres, sont mis en exergue et ça fait, là aussi, du bien de se voir avec ce regard affûté et pourtant tendre de l'auteur. J'ai particulièrement apprécié la description de l'assemblée de prière : c'est exactement ça !
J'ai aussi beaucoup accroché au style. Les incursions des réflexions personnelles de l'auteur sur la situation qu'il a lui-même créée rendent à mon sens le récit encore plus drôle, sans l'alourdir, parce qu'il met le tout en perspective, donc à distance. En bref, si vous avez aimé « Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu ? », que vous soyez catholique ou non, vous devriez passer un bon moment avec ce livre. Parce que ce que j'ai aimé, c'est qu'à aucun moment, les personnages ne sont l'objet de moqueries de la part de l'auteur. Il y a un respect pour les diverses opinions présentées ici qui transparaît dans tout le récit, respect que l'on aimerait retrouver plus souvent dans la « vraie vie » d'ailleurs...


Paru aux éditions Quasar, 2014. ISBN : 978-2-36969-023-8.

mardi 12 avril 2016

Fioretti de Padre Pio, de Pascal Cataneo



Ce livre m'a été prêté par une amie il y a quelques mois (hem...) et j'ai mis un certain temps à l'ouvrir. Peur, sans doute, d'un récit un peu mièvre, un peu trop « merveilleux » pour être vrai…
Eh bien pas du tout. Ces « fioretti » sont de très courts récits de ce qu'a été la vie de Padre Pio et du surnaturel qui a accompagné bien souvent son existence. Il faut dire que la vie de ce moine capucin, mort en 1968, est quelque peu surprenante, tant les charismes dont cet homme, ce saint homme, était doté sont importants.
Padre Pio avait la faculté d'entendre les prières qui lui étaient adressées. Il avait aussi le don de bilocation, c'est-à-dire qu'il pouvait se rendre en divers endroits… sans quitter son couvent de San Giovanni Rotondo, en Italie. Il parlait avec son ange gardien et combattait Satan et ses sbires très régulièrement. Il confessait nombre de pénitents chaque jour et était capable de « voir » leurs péchés et de leur en faire la liste. De fait, il a ramené un grand nombre de personnes dans le droit chemin, pendant des années.
Mais sa vie, si elle était émaillée de grandes grâces, était aussi remplie de beaucoup de souffrances. Ses combats contre le démon étaient réels et, même s'il en était toujours victorieux, grâce au Christ, ils le laissaient meurtri physiquement. Et puis Padre Pio était stigmatisé. Ces blessures le faisaient souffrir chaque jour, spécialement le vendredi, jour où il communiait particulièrement aux souffrances du Christ crucifié.
La vie de cet homme est jalonnée aussi de miracles, de guérisons inexpliquées, obtenues pour ceux qui venaient s'en remettre à lui. Mais Padre Pio n'en tirait aucun orgueil. Il savait que derrière chaque miracle, c'était le Christ qui agissait et qu'il convenait de le remercier. Toute la vie de ce prêtre est une véritable école d'humilité.

On ne s'attendra pas ici à de la littérature, mais à une suite de courts récits et témoignages, souvent attendrissants, parfois « musclés » (le père n'était pas tendre avec certains de ses pénitents!). En tout cas, c'est une bonne entrée en matière pour qui veut connaître la vie de ce saint pour notre temps, particulièrement en cette année où les croyants se placent plus particulièrement sous le regard miséricordieux du Père.


Paru aux éditions Médiaspaul, 1990. ISBN : 2-7122-0362-3.

mercredi 9 mars 2016

Numéro Zéro, de Umberto Eco


1992, Milan. Six journalistes – cinq hommes et une femme – sont embauchés pour créer un quotidien dont l'objet premier est la recherche de la vérité. Ils ont un an pour sortir douze « Numéros Zéros », qui ne doivent servir que de tests auprès du commanditaire afin d'affiner maquette et ligne éditoriale. Au fil des semaines, il devient évident que ce quotidien sera plus un instrument de calomnie et de chantage qu'un véritable magazine d'information à la recherche de la vérité.
Les journalistes fouillent dans le passé pour écrire leurs « Numéros Zéros » et écrivent leurs articles comme s'ils étaient sortis au moment où les événements avaient vraiment eu lieu. Mais leurs enquêtes remuent le passé, notamment celui qui est lié à la mort de Mussolini, qui a dominé tous les événements italiens depuis 1945.
On aurait pu penser au délire d'un journaliste, mais ce même journaliste est brutalement retrouvé mort, un beau matin…

Ce livre, l'un des derniers d'Umberto Eco, décédé il y a quelques jours seulement, est court et rapide à lire (il fait tout juste 220 pages). Sous couvert de roman à suspense, l'auteur dénonce la propension de ses contemporains à voir des conspirations partout, tout en laissant entendre qu'elles peuvent parfois être plus vraies que la réalité…

J'avoue que ce livre m'a quelque peu déçue, laissée sur ma faim. Soit il est trop peu explicite pour moi, soit je n'ai pas tout compris et il faudrait que je le relise. J'ai trouvé beaucoup de zones d'ombres, beaucoup de vides dans les tenants et aboutissants du récit. De nombreuses questions restent sans réponse, donnant un arrière-goût d'inachevé au récit.
A moins de considérer ce livre à un autre niveau : celui de la conspiration dans la conspiration...


Paru aux éditions Grasset, 2015. ISBN : 978-2-246-85770-9

samedi 27 février 2016

Marion Duval, tome 23 : Balactica, de Pascale Bouchié, Frédéric Rosset, Louis Alloing et Jeanne Pommaux.



Yvan Pommaux s'est effacé, laissant la place à Pascale Bouchié et Frédéric Rosset au scénario, toujours avec Louis Alloing au dessin et Jeanne Pommaux à la couleur.

Marion est au bord de la mer, à St Roch, avec son ami Gaël, quand un cargo s'échoue sous leurs yeux. Plusieurs personnes en descendent et, en voulant comprendre ce qui s'est passé, les enfants tentent de les rejoindre. Marion prend les fugitifs en chasse et au cours de la poursuite, elle reconnaît Fil, son ami de longue date (rencontré dans Le Scarabée Bleu, le tout premier épisode de la série).
Alertée, la police arrive sur les lieux en la personne de l'inspecteur Leloup qui, dès le lendemain, interroge les deux enfants. Mais Marion ne veut pas dénoncer Fil, car elle soupçonne Esther, la mère de son ami, de s'être mise une fois de plus dans de mauvais draps.

Avec ce nouvel opus et ces nouvaux auteurs, on s'éloigne un peu plus des gentils albums des débuts de la série. Il y est question de trahison, de violence, on est loin des vignettes et des dénouements du début... Est-ce une évolution logique, dans l'air du temps, quand on sait que les enfants sont soumis de plus en plus jeunes, de plus en plus tôt, à la violence des jeux vidéos et des émissions télé...
Mon fils, 11 ans, est fan...

D'après l'oeuvre de Yvan Pommaux.

Paru aux éditions Bayard (Les Héros Astrapi), 2014. ISBN : 978-2-7470-4967-2

vendredi 26 février 2016

Chic et choc à New York, de Carrie Karasyov et Jill Kargman



Ce livre est arrivé entre mes mains par l'intermédiaire de l'offre « un offert pour deux achetés » qui a lieu régulièrement à la rentrée des classes (et à d'autres moments de l'année, d'ailleurs). J'ai donc pris celui-ci comme j'en aurais pris un autre, en me disant qu'au moins, si ça ne me plaisait pas, je n'aurais pas perdu d'argent. Eh bien ce livre est une bonne surprise !

Melanie est une jeune et jolie jeune femme récemment mariée à Arthur Korn, le « roi » du cercueil qui a fait fortune et s'est installé à New York sur Park Avenue, la plus chère et la plus chic de la mégapole. Ancienne hôtesse de l'air, elle aimerait faire son « trou » parmi les femmes du sérail et met toute son énergie à se faire accepter par les autres, par diverses actions caritatives, participations à des dîners, des ventes privées… Seulement, voilà, Melanie n'est pas « du cru ». Elle ne maîtrise pas les codes de la très haute bourgeoisie et va d'un impair à l'autre, devenant la risée des femmes plus expérimentées et surtout plus « dans le moule » qu'elle. La jeune femme pourrait en arriver au désespoir, sans l'aide de son majordome, M. Guffey, l'ancien majordome de la première Madame Korn, Diandra, reconnue par tous comme une femme de goût, magnifique… parfaite.
Autour de la jeune femme gravite tout un petit monde dont on découvre peu à peu les fêlures, les difficultés, les souffrances (toutes relatives d'ailleurs : il ne faut pas oublier que l'on a affaire là à des femmes qui pensent que cuisiner consiste à mettre au four des plats préparés par le cuisinier qu'elles emploient, ou dont la principale préoccupation de la journée consiste à savoir quelle robe elles vont mettre pour le dîner du soir ou si elles n'ont pas pris trente grammes en se laissant aller à manger quelques glucides lors du dernier café partagé avec les copines de l'immeuble… si tant est que les copines en question en sont réellement…). Certaines de ces femmes sont pathétiques (la palme revient à Wendy, ex-æquo avec Joan, sa meilleure amie), d'autres touchantes (mention spéciale pour Cordelia), d'autres encore sont mystérieuses (là, je pense à Olivia…) mais la plupart sont tellement inconsistantes qu'on les oublie aussi vite que la page du livre où on les a croisées est tournée…

Bienvenue dans le monde de l'argent, du pouvoir, des interrogations totalement hors-sujet pour la plupart des personnes comme vous et moi, dans l'univers des personnes riches et célèbres (dans leur quartier de l'Upper East Side uniquement, pour les autres, ce sont de parfaits inconnus). C'est dans ce monde à la fois futile et excentrique, immensément riche et démesuré que Melanie tente de faire son trou, avant de se prendre la raclée du siècle par l'intermédiaire d'un article de journal dans lequel elle mettait tous ses espoirs de se faire enfin reconnaître par la « jet-set » new-yorkaise la plus en vue…

Je me demandais vraiment comment cette histoire allait terminer, me méfiant quelque peu et ayant peur de tomber dans la nunucherie la plus débile… eh bien pas vraiment, en fait. La fin est quelque peu convenue et téléphonée mais elle réserve de très bonnes surprises. J'ai finalement dévoré ce livre assez rapidement (compte-tenu de mon temps de lecture disponible) et j'en garde une bonne impression. C'est en fait une peinture au vitriol de la très haute société américaine (New-yorkaise pour être exacte) que les auteurs du livre semblent connaître sur le bout des doigts. Et bizarrement, ça m'a fait du bien ! Ce n'est pas de la grande littérature, on est bien d'accord. Mais de temps en temps, un livre léger ne fait pas de mal ! En tout cas, j'ai passé un très bon moment de lecture, drôle la plupart du temps.

Traduit de l'américain par Christine Barbaste.

Paru aux éditions Pocket, 2005. ISBN : 978-2-266-15269-3.

mercredi 24 février 2016

Marion Duval, tome 20 : La Clandestine, de Yvan Pommaux, Louis Alloing, Jeanne Pommaux



Dans cette nouvelle aventure (parue bien après mes 11 ans et que je découvre donc en même temps que mes enfants), nous retrouvons Marion Duval à Paris, à son cours de théâtre et y faisons la connaissance d'Yvan, son professeur et de Max, un « ami » de ce dernier, au chômage.
Nous retrouvons aussi Alain Caudex, rencontré dans les tout premiers volumes (Attaque à Ithaque), et Line, la mère de Marion (que je ne connaissais pas) ainsi que, bien entendu, Alex, le père de la petite héroïne.
Les uns et les autres se retrouvent chez les Duval suite à une découverte archéologique et littéraire importante : des fragments d'Eurydice, une pièce de théâtre écrite par Jean Persil-Ducresson, auteur méconnu mais admiré. Dans le même temps, Alex travaille sur un reportage à propos de la disparition d'une journaliste étrangère, Natalia Stepanovna, qui a fui les persécutions dans son pays.

Voilà Marion lancée dans une aventure rocambolesque où vont se mêler un acteur-apprenti terroriste, de vrais agents secrets, un tueur presque aveugle, deux historiens dont l'un n'est pas tout à fait honnête, une décoratrice et un professeur de théâtre. Il faudra toute l'astuce et la perspicacité de Marion pour dénouer cet imbroglio qui pourrait s'avérer mortel…

Le scénario est toujours tout droit sorti de l'imagination d'Yvan Pommaux et reste fidèle à ce qui a fait le succès de son personnage principal : en particulier l'absence de violence. Et quand il y en a, elle est quasiment sans effet, ce qui rend les bandes dessinées tout à fait abordables par de très jeunes lecteurs. Il a toutefois laissé la place à Louis Alloing au dessin et à sa fille à la couleur. Le style a quelque peu changé, tout en restant très agréable. Les personnages sont très reconnaissables (heureusement!). De la bonne BD pour enfants !


Paru aux éditions Bayard (Les Héros Astrapi), 2011. ISBN : 978-2-7470-3539-2

mercredi 17 février 2016

Marion Duval, Intégrale tome 1, de Yvan Pommeaux



Quand j'avais entre 7 et 11 ans à peu près, je lisais Astrapi, tous les 15 jours, avec une grande assiduité. Entre deux parutions, je relisais les derniers numéros, encore et encore. Et j'étais abonnée à Astrapi quand Marion Duval est arrivée dans le revue.
Ce qu'il y a de drôle avec les livres, c'est que certains ne se démodent pas vraiment. En bande dessinée, oui, il y a des détails qui ne trompent pas. Par exemple les objets technologiques (appareil photo, téléphone…), les coupes de cheveux, les dessins de voitures ou les vêtements, tout cela peut avoir une connotation temporelle très marquée. Et c'est bien le cas ici.
Marion Duval a fait son apparition dans mon bi-mensuel préféré autour des années 1982 ou 1983. C'était une petite fille de 8 ou 9 ans, c'est-à-dire à peu de chose près l'âge que j'avais quand je lisais Astrapi, cheveux mi-longs avec une frange (comme moi) et violoniste (comme moi). Autant dire que l'identification a été assez immédiate.

L'autre jour, mes enfants ont profité de l'une de leurs après-midi de vacances pour aller à la bibliothèque du village et en sont revenus avec ce recueil des trois premières aventures de Marion, à savoir Le Scarabée bleu, Rapt à l'opéra et Attaque à Ithaque. Je suis immédiatement retombée en enfance…

Si le contexte est totalement différent aujourd'hui de ce qu'il était il y a trente ans, j'ai vraiment aimé me replonger dans cette bande dessinée vraiment pour enfants, adaptée à l'âge des lecteurs d'Astrapi (sept à onze ans, donc), où les enfants ne sont pas des imbéciles finis mais les héros de l'histoire. Point de violence, en tout cas dans les trois premiers albums que j'ai relus, mais de jolis sentiments (la voleuse-kidnappeuse qui tombe amoureuse de celui qu'elle a enlevé, le kidnappeur-amateur de musique qui tombe raide dingue amoureux de la diva qu'il a voulu garder pour lui, la voleuse qui, pour ne pas déplaire à celui dont elle est tombée amoureuse dans la première histoire va jusqu'à quitter les lieux sans emporter le trésor que son fils et la fille de son amoureux ont retrouvé)… on est loin, très loin du réalisme des romans policiers mais en plein dans le rêve et l'identification nécessaires à l'imaginaire enfantin pour lui permettre de créer son propre monde.
Le dessin est très classique, avec de grands aplats de couleurs, c'est sobre, efficace. Sur l'auteur, d'ailleurs : il a travaillé aussi à l'Ecole des Loisirs en tant qu'illustrateur et il est venu à la BD sans le savoir… tout simplement parce qu'il avait des soucis avec les descriptions dans les histoires qu'il écrivait et qu'il les transférait dans les images qu'il dessinait. Celles-ci prenaient de plus en plus de place, et il se mit à écrire les dialogues dans des phylactères.

Si vous avez mon âge et que la nostalgie vous gagne, (re)plongez dans ces bandes dessinées, ça fait du bien ! Si vous avez des enfants de 7 à 10 ans, ils peuvent lire ces histoires (filles et garçons!) là aussi, ça fait du bien !


Paru aux éditions Bayard (BD Kids), 2014. ISBN : 978-2-7470-5100-2

mardi 16 février 2016

Les Cafards, de Jo Nesbo



J'avais lu L'Etoile du Diable il y a déjà un certain temps et suis retombée sur cet auteur au cours de l'automne dernier, un peu par hasard, je dois bien le dire. Mais comme je me souvenais avoir beaucoup aimé, j'y suis allée confiante.
Eh bien je ne le regrette pas !

Chronologiquement, Les Cafards est le deuxième volet des enquêtes de l'inspecteur Harry Hole, L'Etoile du Diable venant en cinquième. Harry Hole rentre tout juste d'Australie quand il est envoyé en Thaïlande pour enquêter sur le meurtre de l'ambassadeur de Norvège dans ce pays.
Aidé par les policiers de la ville de Bangkok, dont Liz Crumley (expatriée), l'inspecteur principale chargée de l'enquête, Harry Hole met tout en œuvre pour trouver le coupable. Entre drogue et prostitution, pédophilie et crime organisé, il a fort à faire pour arriver jusqu'à la vérité, amère, dérangeante et sordide.
Cela faisait un moment que je n'avais plus lu de roman policier et j'avoue que cela m'a fait le plus grand bien. Jo Nesbo sait entraîner le lecteur sur un grand nombre de pistes, toutes cohérentes et plausibles, tout en gardant le suspense de la vérité pour les dernières pages. C'est bien écrit (merci au traducteur !), rythmé et haletant ! En bref, c'est du bon.

Traduit du norvégien par Alexis Fouillet
Paru aux éditions Gallimard (Folio policier), 2006. ISBN : 2-07-030089-7

samedi 16 janvier 2016

Le liseur du 6h27, de Jean-Paul Didierlaurent



Je suis tombée sur ce petit livre un peu par hasard chez mon libraire habituel, lors des courses de la rentrée. Le titre me plaisait bien et le "résumé" sur la 4e de couverture m'a alléchée (c'est le but, vous me direz, en général, de ces 4e de couverture et, encore une fois, je suis plutôt bon public).
Comme d'habitude aussi, j'ai mis un peu de temps à l'ouvrir : peu disponible à la rentrée, très occupée en octobre... Bref, je l'ai terminé en novembre et n'ai qu'aujourd'hui le temps de mettre cette chronique en ligne. Hem.

Eh bien, en tout cas, voici un petit livre qui fait du bien !
Guylain est employé dans une entreprise qui transforme les livres voués à la destruction en pâte à papier, prête à être re-transformée... en livres. Un travail ingrat, salissant, parfois dangereux, que Guylain déteste visiblement mais auprès duquel il a trouvé un moyen de sauver quelques bribes de cette littérature vouée au rebut. Tous les matins, dans le RER de 6h27 qui l'emmène au travail, il lit quelques pages rescapées du massacre de la veille, à voix haute, en faisant ainsi profiter ses voisins de trajet.
Le lecteur va rencontrer aussi deux autres amis de Guylain : Yvon, versificateur hors pair et alexandrophile convaincu, et Giuseppe, ancien collègue devenu cul-de-jatte qui n'a de cesse de retrouver ses jambes...
Et puis, un matin, la découverte d'une clé USB sur un des strapontins du RER va changer du tout au tout la vie bien rangée de Guylain.

Je n'en dis pas plus, ce serait dommage si vous n'avez pas encore dévoré ce joli roman.

J'ai été très agréablement surprise par cette lecture. Les personnages sont peu nombreux, 5+1 seulement, et d'eux, en peu de mots, l'auteur parvient à donner une image tendre et très humaine, belle malgré les tares, les défauts, les manques... La fin du roman est ouverte, ouverte sur l'avenir, sur l'espoir, sur la joie et la beauté. J'avoue qu'en ces temps si troublés, cette légèreté fait du bien au moral et réconcilie avec l'autre, cet inconnu qui pourrait faire peur. Ici, il se laisse chercher et apprivoiser peu à peu...

Et puis, ce qui ne gâte rien, ce livre est aussi un ode à la poésie, à l'amour de la littérature, à l'écriture aussi. C'est une invitation à la fantaisie, au partage et à la rencontre. Enjoy !


Paru aux éditions Gallimard, 2015 (Folio). ISBN : 978-2-07-046144-8.

jeudi 14 janvier 2016

Special Branch, 5 : Paris la Noire, de Roger Seiter et Hamo



Nous sommes en 1889, à la veille de l'inauguration de l'Exposition Universelle de Paris. Un voilier anglais est coulé au large du Havre, un train est braqué et de la dynamite y est volée, une rançon est demandée pour que les attentas cessent.
Face à la menace terroriste, la police française a deux pistes : les anarchistes parisiens d'une part et les activistes irlandais d'autre part. Le Premier Ministre britannique envoie alors en France deux enquêteurs de la Special Branch pour assister la police française dans son enquête.

Comme dans toute BD, ce qui m'a d'abord marquée, c'est le graphisme de Hamo, moins réaliste et même presque caricatural que ce à quoi je suis habituée. Et pourtant, passées les premières pages, j'ai énormément apprécié l'ambiance du Paris de la fin du XIXe siècle, avec un dessin fouillé, parfois seulement esquissé mais qui restitue fort bien l'univers à la fois feutré des salons de l'époque et dur et froid de la Révolution Industrielle.
Du côté du récit, j'avoue avoir été un peu déçue : le scénario m'a parfois semblé un peu facile ou tiré par les cheveux... Mais ce manque de réalisme ou cette simplicité n'entache finalement pas trop le récit et c'est avec plaisir que j'ai tourné les pages de cette bande dessinée jusqu'au bout.

Merci mon mari, pour ce chouette cadeau-sans-raison-particulière !


Paru aux éditions Glénat, 2015. ISBN : 978-2-344-00559-0.