vendredi 17 décembre 2010

La Montée des eaux, de Thomas B. Reverdy

Au mois de novembre, j’ai joué sur le blog de Clara à un jeu qui m’a permis de gagner un roman que j’ai dévoré et terminé ce matin. Voici une petite chronique « à chaud », écrite en attendant l’ouverture du magasin pour les courses hebdomadaires (eh oui, il faut rentabiliser le temps passé en voiture et en déplacements, surtout quand il neige !).

C’est un roman à la fois étrange, bien écrit, et construit de manière étonnante, quoique classique finalement.
Au niveau de l'écriture tout d'abord, les phrases sont très typées. Certaines sont extrêmement longues (plus d'une page pour l'une ou l'autre, au moins une demi-page pour beaucoup), rendant le récit dense, voire difficile, parce que beaucoup de propositions, d'incises, nécessitent dans certains cas une relecture du début de la phrase pour que le lecteur sache qui parle, et de quoi. Ce qui peut nuire à la lecture mais la rend aussi très touffue, dense, avec un côté inextricable, urgent. Le choix des mots est fait tout en finesse, dans le détail, et c'est surtout avec ces détails que l'atmosphère est rendue. D'autres phrases, au contraire, sont très courtes, voire quasi-inexistantes : hachées, parfois sans sujet ou sans verbe, elles donnent au texte une urgence également, ainsi qu’un rythme qui contraste avec le temps long qui s'écoule dans d'autres parties du roman.
Le temps, d'ailleurs, semble être un élément fondamental du roman : le temps qui s'écoule, lentement, mais qui n'est jamais nommé. De nombreuses questions n'ont d'ailleurs aucune réponse : à quelle époque ce roman se déroule-t-il ? Sur combien de temps porte-t-il ? Rien n’est dit, ou presque, si ce n’est quelques bribes ici et là, mais ne permettant jamais une chronologie complète des événements, d’autant que le texte semble aller, pour une part, à rebours des événements passés. De quoi perdre un peu plus le lecteur dans ses conjectures sur ce temps qui s’écoule…
Mais plus que du temps qui s’écoule, il s'agit en réalité du temps qu'il fait. Il pleut beaucoup, tout le temps. L'atmosphère décrite est de ce fait noire, pluvieuse, orageuse, violente dans les éléments qui se déchaînent. Ce n’est pour autant pas un roman sur la météo.
Le titre, "La Montée des eaux", fait penser à un roman d'anticipation qui se déroulerait après le réchauffement climatique annoncé. Mais l'auteur ne parle pas de cela, laissant ce possible événement en toile de fond pour s'attacher à son (ou peut-être « ses » ?) personnage. Le temps météorologique est fondamental dans ce roman, semble y avoir la première place, tout en étant toujours en arrière-plan, comme s’il était un élément du décor uniquement, alors que tout tourne autour de cette météo : les affects des personnages sont particulièrement liés au soleil ou à la pluie, rendant cet aspect du livre très important.
Le récit est écrit en alternance, sous deux formes narratives différentes. Un chapitre sur deux, le récit est écrit à la première personne du singulier, par un homme dont on ne connaît pas l'identité. Il y parle, au présent, de sa vie, de ses amis et rencontres, de sa rencontre avec une jeune femme, de l'état dans lequel il se trouve avec elle, de son bonheur, puis de son malheur... Le chapitre suivant est écrit à la troisième personne du singulier, par un narrateur "omniscient", qui décrit la scène où se joue le drame d'un homme qui vient d'enterrer sa mère, et seuls quelques indices permettent de lui donner un nom.

C'est un roman sur la perte, la mort, la séparation, l'amour, la mémoire, peut-être aussi la recherche de sens, d'un sens aux événements qui arrivent dans une vie. Un beau roman, plutôt exigeant  parce que beaucoup dans le non-dit, justement, où un mot, un seul, permet de lier les deux récits, sans pour autant donner jamais la certitude de la justesse de cette explication. Sans être difficile au niveau écriture, la construction du récit et des phrases en fait une lecture un peu moins facile que d'autres, mais très plaisante !

Une belle découverte, en tout cas, et qu’il me soit ici permis de remercier Clara et les éditions Points, pour ce jeu concours qui m’a permis de découvrir un nouvel auteur vers lequel je ne serais peut-être jamais allée sans cela !

Paru aux éditions Points, 2010. ISBN : 978-2-7578-1948-7.

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