jeudi 15 janvier 2015

Le Mystère Goldman : portrait d'un homme très discret, de Eric Le Bourhis



Ma mère m'a offert ce livre pour Noël et, de façon assez surprenante, je l'ai dévoré. Surprenant, parce que j'ai pas moins de 5 autres livres en cours et que je m'étais promis de les terminer avant de commencer celui-là. Mais il faut croire que la fan qui sommeillait en moi devait prendre les rênes de mon cerveau et me propulser directement dans les pages de cette biographie de mon chanteur préféré...
Il faut dire que, quand j'ai découvert Goldman, j'avais 13 ans je crois, il est devenu mon "idole des jeunes" à moi. Le premier album que j'ai écouté, c'est Positif, soit en réalité son troisième en solo. Tous les albums parus précédemment (jusqu'à Entre gris clair et gris foncé inclus, puisque, même s'il est paru plus tard que Positif, je ne l'ai eu entre les mains pour la première fois que l'année suivante) sont venus plus tard, en bloc, offerts par mon parrain (un souvenir émerveillé !). Quant aux suivants, je les ai acquis les uns après les autres, quasiment religieusement, au fur et à mesure de leurs sorties dans les bacs des disquaires... Du coup, j'étais très curieuse de lire ce livre, forcément, même si je n'ai jamais été une fan au sens le plus jusqu'auboutiste du terme... (je confesse un poster dans mon armoire et des paroles de chansons dans mon agenda, mais c'est à peu près tout en ce qui concerne ma "Goldman-mania" à moi... sauf si on prend aussi en compte le contexte sonore où j'ai envahi la maison de mes parents de ses chansons jusqu'à mon départ définitif...)

Difficile d'écrire une critique de ce livre, paradoxalement. Pour plusieurs raisons : un livre, c'est un style d'écriture, un récit (fictionnel ou pas), une documentation...
Ici, il s'agit de la vie d'une personne, de la documentation sur cette personne et de ce que l'auteur de ce livre peut apporter au lecteur concernant la vie de la personne en question. Et je dois avouer que je n'ai pas appris grand-chose, si ce n'est toute la partie (la plus importante pour moi dans le livre en fait) qui raconte l'histoire de la famille Goldman. C'est-à-dire qu'en réalité, plus que "qui est Jean-Jacques Goldman ?", l'auteur raconte plutôt "d'où vient Jean-Jacques Goldman ?". Les 100 premières pages s'attachent en réalité à la famille du chanteur plutôt qu'au chanteur lui-même, les 136 suivantes étant bien consacrées, elles, à sa carrière. On pourrait penser que l'auteur du livre met à profit ces 100 premières pages pour faire une étude fouillée sur l'enfance, la scolarité de Jean-Jacques Goldman mais... non. Il y est plus question de son père et, surtout, de son frère. Après réflexion, cela paraît en fait tout à fait normal de partir de là pour essayer de comprendre une personnalité comme celle de Jean-Jacques Goldman. En effet, une personne ne vient jamais de nulle part mais est le "produit" d'une histoire et d'un héritage familial... Alors oui, bien sûr, l'histoire de Pierre Goldman, ce demi-frère révolutionnaire parti au Vénézuela puis revenu dans la Capitale et qui finira accusé (à tort ou à raison, cela reste un mystère) de meurtre, ainsi que le passé de résistant communiste de leur père, ont sûrement façonné la personnalité de Jean-Jacques, le petit frère. Eric Le Bourhis insiste d'ailleurs beaucoup là-dessus... Mais je ne sais pas, lors de ma lecture, j'ai parfois eu le sentiment que cette biographie de Jean-Jacques Goldman était comme un prétexte à la réouverture d'un dossier "chaud", d'une enquête judiciaire qui n'avait jamais trouvé de conclusion satisfaisante... J'ai même eu parfois le sentiment d'être dans une émission de télévision, du type "Faites entrer l'accusé", c'est pour dire ! Bref, j'ai ressenti une sorte de malaise, même si, au demeurant, les arguments de l'auteur pour expliquer en partie la personnalité discrète de Jean-Jacques Goldman sont troublants et plausibles.

Sinon, pour ce qui est de la vie de Jean-Jacques Goldman lui-même... eh bien je dirais que je n'ai pas appris grand-chose, si ce n'est la difficulté qu'il a eue, comme nombre d'auteurs-compositeurs à leurs débuts, à "percer" dans le domaine musical. Beaucoup des faits qui sont relatés dans ce livre sont de notoriété publique et accessibles sur n'importe quel site internet ayant pour sujet l'auteur-compositeur – sites qui eux-mêmes tirent leurs informations d'interviews télévisées, d'articles dans la presse people, etc. Du côté documentaire donc, je suis quelque peu déçue, sauf en ce qui concerne les entretiens que l'auteur a eus avec les proches de Jean-Jacques Goldman (un ancien membre de Taï Phong, son premier directeur artistique...). Là, tout de suite, le livre devient plus "vivant", et ça fait du bien. C'est finalement dans ces témoignages que Jean-Jacques Goldman devient autre chose qu'une machine à tubes et que le récit prend une belle épaisseur.

À la fin du portrait, Eric Le Bourhis a cru bon d'ajouter un "abécédaire indiscret de J. J. G.", dont le rôle est, semble-t-il, de compléter la biographie par des anecdotes, par exemple. Sauf que, plusieurs fois, ce sont simplement des redites de ce que l'auteur a déjà longuement exposé dans le corps du livre... Alors je me pose la question de savoir quel est l'intérêt de cet abécédaire, sinon de rajouter quelques pages à l'ouvrage ? Tout n'est, bien sûr, pas inutile, mais nombre des informations contenues dans ces dernières pages auraient eu tout à gagner à être développées (pour celles qui n'y étaient pas déjà) dans le corps de la biographie...

Contrairement aux apparences, je ne suis pas déçue par ma lecture. C'est un livre qui se lit très vite, qui "fait du bien" en ce qu'il parle à la fan midinette que j'étais il y a des années. Mais, l'âge aidant, peut-être, je deviens de plus en plus exigeante quant à mes lectures et celle-ci restera une parenthèse bienvenue plus qu'une lecture indispensable... (maman, c'est un très beau cadeau que cette biographie et je suis bien heureuse de l'avoir dans ma bibliothèque ! Merci de m'avoir replongée dans cet univers qui a accompagné toute mon adolescence et ma jeunesse !)

Conclusion bis : mes lecteurs habituels verront bien dans ce billet que je suis très mitigée : à la fois enthousiasmée par cette lecture parce que quand on aime, on est heureux d'entendre et de lire sur le sujet que l'on apprécie, même si ce que l'on apprend n'est pas toujours neuf et qu'il y a des redites ; mais je suis aussi assez circonspecte parce que le style de l'auteur, pour le coup, ne m'a pas totalement convaincue. Et puis, il y a des coquilles marrantes, en particulier dans la partie des notes qui suit immédiatement le texte, où l'auteur n'a pas tout à fait terminé d'inscrire ses références... en particulier à la fin, où la note mentionne : "110. Livre Didier Varrod, à compléter."
Cette note a failli me faire éclater de rire ! Une note est une information importante parce qu'elle permet de revenir à la source documentaire de l'auteur. Et ici, il a simplement omis de la citer, si ce n'est l'auteur du livre. On ne connaît ni son titre, ni l'année de parution, ni la maison d'édition... rien, donc. Espérons pour les puristes que Didier Varrod n'a écrit qu'un livre ! :)
Cette petite anecdote est exactement symptomatique de ce que je disais plus haut : j'ai l'impression d'avoir entre les mains un livre écrit par un spécialiste de la presse people ou de la presse à sensation, qui écrit tout à fait correctement mais ne s'embarrasse pas d'une vraie discipline de recherche. Cela passe très bien dans le contact, visiblement, avec les "témoins", mais fait quelque peu amateur quand il s'agit de la documentation écrite. En tout cas, malgré ces petits défauts, j'ai passé un bon moment, plongée dans le "mystère Goldman".

En fait, je me dis, après cette lecture, que faire la biographie d'un homme (ou d'une femme, d'un être humain en général) est une entreprise peut-être assez vaine dans la mesure où un être humain est un mystère à lui tout seul... Il n'est pas besoin de s'appeler Jean-Jacques Goldman pour cela : qui peut donc se targuer de connaître parfaitement quelqu'un au point de percer son "mystère" ?


Paru aux éditions Prisma, 2014. ISBN : 978-2-8104-1344-7.

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