mercredi 4 juin 2025

Saint Pierre : une menace pour l’Empire romain, de Patrice Perna et Marc Jailloux




L’histoire commence à Rome, dans le cirque du Vatican, en 64 après Jésus-Christ. Un incendie a dévasté la ville, et Néron, l’Empereur romain, a désigné les coupables : les chrétiens. La persécution est terrible : les « coupables » sont torturés, offerts aux bêtes, suppliciés par le feu ou encore crucifiés. Avec des raffinements infinis, comme en est capable l’inventivité romaine. Pierre fait partie de ceux qui ont été arrêtés. Alors qu’il va mourir sur la croix, il se remémore les rencontres avec Jésus, les trois années sur la route, les guérisons, son triple reniement, la faiblesse de sa foi… Et pourtant, c’est lui, Pierre, que Jésus a choisi pour chef de l’Église naissante…

Le 26 juin 1968, le pape Paul VI annonce que les restes du premier pape ont été retrouvés sous la basilique Saint Pierre, juste sous l’autel.

Cette bande dessinée est très belle, malgré l’horreur de ce qu’ont vécu Pierre et les premiers chrétiens. C’est conforme à ce que j’ai appris durant mes cours d’histoire de l’Église, donc il semble que les auteurs se sont très sérieusement documentés ! Et le bonus est à la hauteur : un dossier documentaire de huit pages sur l’histoire de Saint Pierre et de la basilique Saint Pierre de Rome, avec textes et photos.

C’est vraiment très intéressant, très bien documenté, compréhensible et juste historiquement, sans être compliqué à comprendre.

C’est une très bonne introduction aux débuts de l’Église. Je recommande !


Paru aux éditions Glénat et Cerf, 2019 (Un pape dans l’histoire). - ISBN : 978-2-344-02838-4/001


mercredi 28 mai 2025

Les Aventures de Lefranc, tome 4 : Le Repaire du Loup, de Bob de Moor et Jacques Martin

Dans le val d’Annifer, le plus grand barrage européen est en construction. L’épicier du village découvre le signe du Loup tracé sur la porte de sa camionnette. Or ce signe apparaît à chaque fois juste avant un attentat. Cette fois-ci, c’et le pont qui a sauté. Le village est ainsi isolé, et l’épicier court se plaindre au maire, en pleine réunion de crise. Ce dernier refuse l’intervention dela police, mais a demandé à Lefranc, journaliste, de mener son enquête. Cette dernière le dirige vers l’hôtel des Diablons, au sommet de la montagne proche… Mais Lefranc n’est pas au bout de ses surprises !

J’ai redécouvert Lefranc depuis quelques années, et j’apprécie le classicisme de cette bande dessinée bien rassurante. L’aventure, les rebondissements, les trahisons, tout est là ! Jusqu’au dénouement final, où la justice triomphe malgré tout.

Une bande dessinée qui fait du bien, dans la veine de Yoko Tsuno. Et si vous ne connaissez pas encore, il y a plein de posts sur cette série sur ce blog !

Paru aux éditions Casterman, 1974. ISBN : 978-2-203-31403-0

lundi 19 mai 2025

Le Maître de la Terre : la crise des derniers temps, de Robert Hugh Benson


Contrairement aux apparences, ce roman a 115 ans au moment où j’écris ces lignes. Ecrit en 1910 par Robert Hugh Benson, prêtre élevé dans l’anglicanisme converti au catholicisme, ce roman est dans la même veine que « Le Meilleur des Mondes » et « 1984 ». Il s’agit d’un roman dystopique dont l’action se situe quelque part après une année 1959 qui n’a rien à voir avec celle que nous avons vécue, dans un monde multipolaire où se joue un conflit qui n’est pas sans rappeler une situation que nous connaissons aujourd’hui : celle de la foi contre l’athéisme, le second ayant largement supplanté la première.

J’ai entendu parler de ce roman pour la première fois il y a quelques années, par le Pape François qui en conseillait la lecture, en particulier aux prêtres et aux futurs prêtres. Ce qui est étonnant, ici, c’est l’actualité des questions abordées, malgré le temps et le côté dystopique de l’oeuvre. En France, en 2025, on s’interroge sur l’opportunité d’une loi au sujet de l’euthanasie et du suicide assisté. Ce roman met cette loi en exergue, même si elle n’existait pas encore, bien sûr, ni en France, ni en Angleterre, en 1910. Dans ce monde, l’athéisme a gagné une nouvelle religion est née, avec son culte, ses temples, sa liturgie, ses prêtres. La foi catholique subsiste toujours, mais perd du terrain, jusqu’à être réduite à peau de chagrin.

Un homme providentiel est est apparu récemment. Felsenburgh semble s’imposer naturellement comme leader mondial charismatique. Olivier Brand ne dira pas le contraire : sceptique jusqu’à ce qu’il le rencontre, il devient, avec sa femme, l’un de ses plus fidèles soutiens.

Dans le même temps, la mère d’Olivier, fervente catholique, mais en cachette de son fils pour ne pas jeter sur lui l’opprobre et le discrédit, est en fin de vie. Elle fait venir chez elle, en l’absence de son fils et de sa belle-fille, un prêtre, pour se confesser, Percy Jackson. Mais Olivier rentre plus tôt que prévu et, stupéfait, rencontre chez lui Percy, qui ressemble étrangement à Felsenburgh.

C’est un combat à mort qui se joue ici, combat entre le Christ et l’Antéchrist. Nous sommes à l’heure de l’Apocalypse, la « Révélation ». C’est magistral. Et fort bien écrit.


Paru aux éditions Pierre Téqui, 2024. ISBN : 978-2-7403-2630-5.


mercredi 14 mai 2025

La Flèche ardente, de Jean Van Hamme, Etienne Schréder et Christian Cailleaux


Cette bande dessinée reprend les personnages créés par Edgar P. Jacobs dans « Le Rayon U », dont elle constitue la suite.

Dans un monde étrange, mi-lacustre, mi-souterrain dont on ne saurait préciser ni l’époque, ni l’emplacement réel (terrestre ? Extra-terrestre?), deux empires s’affrontent, l’Empire d’Austradia et celui de Norlandia, au détriment d’un troisième, celui qui a pour dieu Puncha Taloc, le gardien du gisement d’Uradium dont a besoin le professeur Marduk, de Norlandia, pour finaliser le « Rayon U ». Marduk rêve de créer une arme puissante, pour mettre au pas l’Austradia. Mais pour accéder au gisement, dont personne ne connaît l’emplacement exact, il faut affronter Puncha Taloc et le peuple qui lui est soumis, et donc le chef est le prince Nazca.

Dans ce récit se mêlent histoire (invasion des peuples d’Amérique latine et centrale par les Espagnols en particulier), science-fiction (le monde à conquérir est rempli d’animau ayant, sur terre, déjà disparu au moment où l’homme fait ses premiers pas vers l’intelligence), et de multiples références, tant à Napoléon qu’au projet Manathan par exemple.

Malgré ce florilège, l’histoire parvient à rester cohérente, si l’on accepte la simultanéité des dinosaures avec les avions de combat et la technologie du XXe siècle en matière d’espionage.

La parenté entre les personnages principaux et ce qui deviendra par la suite la série Blake et Mortimer est elle aussi évidente : on peut retrouver, sous les traits de Marduk, le Professeur Mortimer (en version machiavélique), Calder est un pré-Francis Blake plutôt convainquant, quant à Dagon, il préfigure Olrik et sa capacité à renaître de ses cendres indéfiniment. Adji, enfin, semble être le prototype de Nasir, le fidèle serviteur de Philipp Mortimer.

Dans « Le Rayon U » et la suite imaginée récemment, ce sont donc les ingrédients de « Blake et Mortimer » qui sont déjà présents, y compris les thèmes récurrents comme l’aviation, les conflits entre états, la technologie utilisée à mauvais escient, les incursions dans le domaine de la science-fiction, de l’étrange et de l’apocalyptique. Le tout avec un côté un peu suranné qui, malgré la parution récente (2023), donne le sentiment de se trouver face à une histoire et des planches bien plus anciennes, au moins dans le style graphique.

Si c’était là l’objectif, je dirais qu’il fonctionne parfaitement pour moi. Maintenant… j’avoue ma grande préférence pour « Le Rayon U » d’une part et, surtout, pour « Blake et Mortimer »...


Paru aux éditions Blake et Mortimer, 2023. ISBN : 978-2-8709-7311-0


lundi 21 avril 2025

Les Actes des Apôtres, de Chantal Reynier


 

Dans le cadre de la reprise de mes études, en 2021-2022, j’avais acheté ce livre (et d’autres), afin de mieux comprendre les écrits du Nouveau Testament. Pressée par le temps et des lectures plus urgentes, ce n’est qu’en janvier 2025 que j’ai pu lire cet ouvrage très intéressant sur les Actes des Apôtres. La collection « Mon ABC de la Bible » est une boîte à outils pour mieux comprendre les différents livres qui composent la Bible. Chaque ouvrage est en fait un guide de lecture qui identifie le ou les auteurs, restitue le contexte du livre étudié, les contextes historique, culturel et rédactionnel, procède à une analyse littéraire, avec structure et résumé, chronologie, cartes, bibliographie… Le livre est surtout une analyse sous le prisme des grands thèmes abordés, en étudie la réception, l’influence et la qualité. C’est donc une excellente introduction, en un peu plus de 150 pages, pour mieux entrer dans ce corpus fascinant qu’est la Bible. Afin de ne pas (trop) se tromper en le lisant, et de ne pas passer à côté d’éléments essentiels.

La Bible n’est en effet pas tout à fait un livre comme les autres. Plus qu’un livre, c’est plutôt une bibliothèque, d’ailleurs. Mais c’est surtout la Parole de Dieu, écrite sur plusieurs milliers d’années, et qui a toujours, aujourd’hui, quelque chose à nous dire, à nous, lecteurs du XXIe siècle.


Paru aux éditions du Cerf, 2015 (Mon ABC de la Bible). - ISBN : 978-2-204-10468-5.

mercredi 16 avril 2025

Les Aventures d’Alix, tome 43 : Le Gardien du Nil, de Valérie Mangin, Chrys Millien, d’après les personnages de Jacques Martin.

 

Cet album, l’un des derniers parus, reprend la suite du onzième album de la série, « Le Prince du Nil ». Alix et Enak sont agressés dans une rue de Rome alors qu’ils discutent avec Marc-Antoine, venu les solliciter pour participer à l’une des campagnes militaires de César. Partis à la recherche de l’agresseur, la piste les conduit à Alexandrie, en Egypte, auprès de Cléopâtre, et ils lui demandent son aide. La véritable « cible » de l’auteur de l’agression n’est pas Marc-Antoine, mais Enak. Le jeune homme étant en danger, Alix préfère partir seul à Sakhara, d’où vient l’agresseur, et où il est confronté aux survivants du drame qui a détruit la ville, une chute de météorites. C’est finalement Qaâ, le prophète des ruines de Menkhara, qui permettra à Alix de trouver le moyen d’aider Enak et les survivants, face à ceux qui cherchent à s’accaparer le pouvoir à Sakhara…

Encore une série reprise par de talentueux auteurs après la mort de son créateur. Jacques Martin est mort en 2010, mais, dès le début des années 1990, il avait été contraint par la maladie à former des équipes pour l’aider dans sa tâche. C’est ainsi qu’il est l’auteur des dix-neuf premiers tomes de la série, le scénariste des cinq tomes suivants, et qu’il a pu encore travailler sur le synopsis des quatre albums qui suivront.

Le dessin de ce 43e tome reste fidèle à celui de Jacques Martin, même s’il est, bien sûr, plus moderne que l’original. De la même façon (tout comme pour la série « Blake et Mortimer », d’ailleurs), les longs cartouches explicatifs ont disparu pour laisser place à des cases plus dynamiques. On gagne en facilité de lecture, en fluidité aussi. Le dessin est toujours aussi précis et plutôt réaliste et… c’est beau.

La seule vraie différence, à mes yeux, par rapport aux premiers albums, c’est le traitement des personnages féminins, très rares dans cette série, mais qui, sous le crayon de Jacques Martin, m’ont toujours paru très masculins, justement. Ici, deux personnages féminins se détachent : Cléopâtre, reine d’Egypte, et Kiya, l’une des survivantes de Sakhara, qui aide Alix dans sa mission.

En tout cas, j’ai pris beaucoup de plaisir à lire cette BD, reçue à Noël !


Paru aux éditions Casterman, 2024. - ISBN : 978-2-203-25705-4.


lundi 7 avril 2025

La Végétarienne, de Han Kang


 

Une amie de mon fils, coréenne, m’a offert deux livres de Han Kang, lorsque nous nous sommes rencontrées en janvier. « La Végétarienne » est le premier des deux, et, si je ne connaissais pas du tout cette auteure, j’ai été très agréablement surprise. Si toute son œuvre à à l’image de ce roman, je comprends pourquoi elle a reçu le Prix Nobel en 2024 !

Yonghye se réveille, une nuit, et vide le réfrigérateur de toute la viande qu’il contient. Au grand étonnement de son mari, puis de sa sœur et de ses parents, elle devient végétarienne, mais ne semble pas vouloir s’arrêter sur le chemin du dépouillement. Jusqu’à l’absolu.

Ce qui m’a le plus marquée, c’est la construction du roman en trois parties bien distinctes, toutes écrites à la première personne, mais la personne changeant à chaque fois. La première est écrite du point de vue du mari de Yonghye, la seconde de son beau-frère et la troisième de sa sœur. Trois personnages principaux qui ne sont en réalité que des personnages secondaires, témoins impuissants, fascinés, de la lente descente de Yonghye vers la folie.

Depuis un peu plus de deux ans, je travaille comme aumônier en hôpital psychiatrique. Et le récit dit bien l’incompréhension des proches face à la maladie. Là où la raison, la contrainte, n’ont plus aucune place face à l’angoisse existentielle du patient, qui est plus forte que la peur, même de la mort.

J’ai trouvé ce récit très dur (notamment la deuxième partie) et violent, mais, paradoxalement, cette dureté et cette violence sont décrites avec une grande douceur. Comme si le lecteur entrait avec Yonghye dans un monde cotonneux, presque irréel…

C’est la première fois que je regrette de ne pas pouvoir lire certains livres dans leur langue originale. Si la traduction française est si belle, j’ose espérer qu’elle rend fidèlement la plume de Han Kang. Parce qu’un livre, ce n’est pas qu’une histoire. C’est aussi un style, un univers mental que la traduction trahit toujours, au moins un peu, au moins en partie.

En tout cas, le travail des deux traducteurs, Jeong Eun-Jin et Jacques Batilliot est remarquable. J’ai hâte de lire le deuxième livre de cette magnifique auteure. Quand j’aurai un peu de temps !

Merci Ji-Young, pour cette très belle découverte.


Paru aux éditions LGF, 2016. - (Le Livre de Poche). - ISBN : 978-2-253-06790-0.