Paru aux éditions Jean-Claude Gawsewitch, 2010. ISBN : 978-2-35013-241-9.
jeudi 30 décembre 2010
Les Neuf vies de Dewey, de Vicki Myron et Bret Witter
Paru aux éditions Jean-Claude Gawsewitch, 2010. ISBN : 978-2-35013-241-9.
dimanche 26 décembre 2010
Sasmira, tome 1 : L'Appel, de Laurent Vicomte
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Edition de 1997 (Les Humanoïdes Associés) |
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Edition de 2008 (Glénat) |
samedi 25 décembre 2010
Un Soir de décembre, de Delphine de Vigan
vendredi 17 décembre 2010
La Montée des eaux, de Thomas B. Reverdy
dimanche 5 décembre 2010
Je suis deux, de Marietta Ren et Eugény Couture
samedi 4 décembre 2010
Le Bleu est une couleur chaude, de Julie Maroh
vendredi 3 décembre 2010
Le Carré de la vengeance, de Pieter Aspe
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BOB : Blog-O-Book pour les habitués de ce site
LGF : Librairie Générale Française, éditeur de la collection Le Livre de Poche
samedi 27 novembre 2010
Gonzo Lubitsch ou l'incroyable odyssée, de Nick Harkaway
Un grand, grand merci aux éditions Robert Laffont et à Blog-o-book pour ce partenariat !
Traduit de l'anglais par Viviane Mikhalkov.
Paru aux éditions Robert Laffont, 2010. ISBN : 978-2-221-11035-5
lundi 22 novembre 2010
Microbes, de Diego Vecchio
lundi 15 novembre 2010
Schizomètre, petit manuel de survie en milieu psychiatrique, de Marco Decorpeliada

vendredi 12 novembre 2010
Personne, de Gwénaëlle Aubry

A travers le roman écrit par son père maniaco-dépressif, qu’elle découvre après sa mort, l’auteur tente de mettre de l’ordre dans le désordre. A ce titre, le choix de l’abécédaire est tout à fait pertinent en ce qu’il reflète à la fois la tentative et l’impossibilité qui’ y a à la mener à bien. La construction par « lettre » empêche toute chronologie, et donne un roman éclaté, où l’histoire est décousue, telles les pièces d’un puzzle qui ne parviennent pas à reconstituer le décor. Il est donc impossible de reconstituer l’histoire en elle-même, mais l’important semble être ailleurs.
Au niveau de l’écriture elle-même, ce roman est assez perturbant, dans la mesure où l’auteur utilise des phrases très longues, avec de nombreuses énumérations, des apartés, qui donnent parfois l’impression de fouillis et entravent la compréhension du texte. Mais là encore, ce parti-pris permet d’entrer dans la confusion des sentiments de cette femme pour son père. Elle a souffert par lui, à cause de lui, de sa maladie. Elle l’a aimé infiniment aussi. Les choix du processus d’écriture et de la construction du récit illustrent donc ici tout autant que les mots la confusion du père et les efforts que fait sa fille pour le comprendre, pour réapprendre qui il était.
C’est en définitive ce que je retiendrai de ce récit : il s’agit d’un cri d’amour d’une fille pour son père, malgré la déchéance, malgré la maladie, la souffrance et la mort. Reste la douleur et l’avenir, la reconstruction.
Paru aux éditions Mercure de France, 2009 (Bleue). ISBN : 978-2-7152-2929-7
lundi 8 novembre 2010
Le Bruit des trousseaux, de Philippe Claudel

J’avais déjà lu, du même auteur, « La Petite fille de monsieur Linh », que j’avais beaucoup, beaucoup aimé. Ici, j’ai retrouvé le style de Claudel, à la fois poétique et sensible, même si le récit est totalement différent. Parler de « récit », d’ailleurs, semble inapproprié, puisqu’il s’agit plutôt là d’une sorte de liste, de catalogue sans classement, sans ordre apparent. L’auteur témoigne ici de ses onze années en tant que professeur en prison. Onze années durant lesquelles il a dispensé ses cours aux détenus, mineurs comme majeurs. Il y parle des cours, ou plus exactement des conditions dans lesquelles il donnait ses cours, des détenus, de la prison, des gardiens, de la vie quotidienne, des mots de la prison… il la décrit de l’intérieur, avec un œil extérieur. D’ailleurs, il le dit lui-même, il s’agit ici d’un « faux témoignage » : « Il me manque quelque chose d’essentiel pour parler de la prison, c’est d’y avoir passé une nuit. » Comme si son témoignage était incomplet, qu’il n’avait pas pu, malgré onze années passées à y donner des cours, à y rencontrer les détenus et à échanger avec eux, saisir l’essence même de ce qu’est la prison, l’incarcération ; comme si son témoignage n’était pas, et ne serait jamais assez complet pour décrire la réalité de la prison.
Un beau récit malgré tout : si effectivement le lecteur ne peut percevoir à travers ces lignes qu’un pâle reflet de la vie derrière les barreaux, le texte a au moins l’immense mérite de tracer une sorte de portrait très nuancé, peut-être un peu flou mais malgré tout sans doute ressemblant de cette vie enfermée. Et en tout cas, Claudel y raconte son expérience, et uniquement celle-ci, sans prétendre à autre chose. Et ce n’est déjà pas si mal.
Paru aux éditions LGF, 2008 (Le Livre de Poche). ISBN : 978-2-253-07297-3
vendredi 5 novembre 2010
La Peur, de Stefan Sweig

Ces textes forment un tout extrêmement cohérent, où l'écriture fourmille d'images, de détails, d'odeurs, d'atmosphères variées, étonnantes, suffocantes, affolantes.
De très beaux textes, émouvants, chaleureux même si les sujets sont douloureux, parfois sordides.
Stefan Sweig y peint tout simplement à merveille les passions humaines.
Paru aux éditions LGF, 2002 (Le Livre de Poche)(réimpression 2009, avec une autre couverture). ISBN : 978-2-253-15370-2
jeudi 28 octobre 2010
Pas ce soir, je dîne chez mon père, de Marion Ruggieri

Voilà une lecture légère et réjouissante. Marion a trente ans, son père en a cinquante-cinq, mais il se comporte avec sa fille comme si elle était au moins aussi âgée que lui, ou plutôt comme s’il était aussi jeune qu’elle. Et elle, du coup, a l’impression d’être beaucoup, beaucoup plus âgée qu’elle ne l’est en réalité. Ce court roman raconte les déboires amoureux de cette jeune femme qui cherche sa place entre sa mère absente et infidèle et son père coureur de jupons de plus en plus jeunes.
Je me suis beaucoup amusée à la lecture de ce roman. Non pas qu’il soit comique, mais plutôt que l’humour incisif de l’auteur jaillit au détour d’une phrase, donnant un tour surréaliste à la scène décrite. Un roman sur les relations entre un père et sa fille, sur le fait de grandir, de devenir adulte, sur la crainte de ne plus être aimée par celui qu’elle aime et admire le plus, malgré elle d’ailleurs. L’écriture est volontiers provocatrice, et j’ai parfois eu l’impression de lire les propos d’une adolescente attardée plutôt que d’une trentenaire, par le ton, les mots employés. A aucun moment je ne me suis ennuyée, et si la construction du roman, avec des allers-retours dans le passé de plus en plus fréquents, n’est pas toujours simple à suivre, on s'y retrouve toujours très bien, tant cette histoire pourrait être celle de beaucoup. L’auteur joue volontiers aussi sur la confusion des personnes : à la fin, on ne sait plus vraiment de qui elle parle : de son ami « officiel » ? de son père ? de son amant ? Mais c’est pour mieux faire entendre au lecteur le propos sous-jacent de ce livre, qui parle avant tout de l’immaturité de certains adultes, de la confusion des rôles dans notre société, voire de leur inversion parfois : les enfants doivent rester à leur place d’enfant, encore faut-il que les parents ne les mettent pas à une autre place que celle où ils doivent être… Un roman autobiographique à la fois tendre, drôle et cruel, sur cette obsession du jeunisme qui concerne finalement bien du monde dans nos sociétés actuelles.
Paru aux éditions LGF, 2009 (Le Livre de poche). ISBN : 978-2-253-12665-2
Paru aux éditions Grasset, 2008. ISBN : 978-2-246-70831-5
lundi 25 octobre 2010
Concerto à la mémoire d'un ange, d'Eric-Emmanuel Schmitt

dimanche 24 octobre 2010
Un Père pour mes rêves, d'Alan Duff

dimanche 26 septembre 2010
Le Crieur de nuit, de Nelly Alard

Alors là, attention, chef-d’œuvre !
Ce livre très court est époustouflant, et m’a énormément touchée, pour beaucoup de raisons.
Il s’agit d’une histoire en sept chapitres, en sept jours. Sept jours entre le moment où Sophie, la narratrice, apprend le décès de son père, en Bretagne, et celui où elle rentre chez elle à Paris, apaisée, après les obsèques. Sept jours qui lui permettent de parler à son père comme jamais elle n’a pu le faire de son vivant, sept jours pour lui dire qui elle est vraiment, comment elle a grandi, combien elle a souffert, combien elle l’a aimé aussi. Sept jours pour commencer le chemin qui la mène à la guérison, sept jours pour le laisser partir, pour lui pardonner. Le personnage du père est en effet un homme odieux, un véritable tyran domestique, qui a terrorisé ses trois enfants, Isa, Eric et Sophie, durant toute leur enfance, allant jusqu’à leur donner envie de le voir mourir. Parkinsonien pendant trente ans, ses enfants assistent à sa déchéance, à sa mort lente, qui se conclut par la mort véritable. Ce roman tout en finesse raconte donc l’enfance meurtrie, mais aussi l’attachement de Sophie envers son père, contre toute logique, contre toute vraisemblance. C’est en fait l’histoire d’un amour filial qui va au-delà de la souffrance, jusqu’au pardon.
Outre l’histoire formidable, j’ai été touchée à un tout autre titre, parce que ce roman se passe dans le Finistère Nord, et que les souvenirs de Sophie parlent de lieux que je connais bien (Brest, Fouesnant, le Cap Coz en particulier, Lorient, Cléder…). D’autre part, tout au long du récit, comme venant en appui ou en complément de l’histoire elle-même, des passages du livre « La Légende de la Mort chez les Bretons Armoricains », d’Anatole Le Braz, sont cités et illustrent parfaitement le propos de l’auteur. Ces passages l’éclairent aussi d’un jour nouveau, ajoutant la poésie, la féérie, les contes des Anciens avec tout ce qu’ils ont de merveilleux et de précieux, à une histoire forte, bien plus complexe qu’il n’y paraît au premier abord. Plus j’avançais dans la lecture, moins les rapports entre les personnages me semblaient simples et évidents. Au fil du temps qui passait se tissaient des liens complexes, rendant humain cet homme tyrannique qu’était le père, et ce sentiment est exacerbé par les extraits de « La Légende de la Mort », qui mettent en parallèle les anciennes légendes et ce que nous savons aujourd’hui de la vie et de la mort. Ce livre d’Anatole Le Braz fait partie des monuments de la littérature bretonne, un des incontournables avec le Barzaz Breizh. On y trouve toute la substance des anciennes croyances bretonnes, celles d’avant le christianisme, qui ont perduré après l’évangélisation de la région. On y retrouve la figure des Lavandières de la nuit, de l’Ankou bien sûr, et celle, moins connue, mais non moins redoutable, du Crieur de nuit. En intitulant son roman de la sorte, l’auteur le place d’emblée dans la lignée de ces légendes sans âge et fait entrer le merveilleux des anciennes croyances dans le quotidien du 21e siècle.
Ce livre à peine refermé, je n’ai qu’une envie : le rouvrir, le savourer, et ressortir « La Légende de la Mort » de ma bibliothèque pour me replonger dans ces contes et légendes bretons qui ont en partie construit mon imaginaire.
Paru aux éditions Gallimard, 2010. ISBN : 978-2-07-012911-9.
Et pour les curieux :
Anatole le Braz : La Légende de la mort chez les Bretons armoricains, paru aux éditions Terre de Brume, 1991 (Bibliothèque celte). ISBN : 978-2-908021-30-1
mercredi 22 septembre 2010
Nulle et Grande Gueule, de Joyce Carol Oates

De fil en aiguille, de trahison en enlèvement, les deux adolescents américains vont se rapprocher et se découvrir.
Ce roman a été publié au départ dans une édition pour adolescents, et personnellement, je l’ai bien aimé, avec quelques réserves. Au fil de ma lecture, j’imaginais sans peine ma fille, quand elle serait adolescente, lire ce livre et s’identifier soit à Ursula, soit à Matt. Il ne faisait aucun doute lors de ma lecture qu’elle l’aimerait beaucoup. C’est un récit tendre, même si les sujets abordés sont un peu difficiles : il y est question de la suspicion, de la honte de soi, de la solitude, de la mise au ban, du rejet, du mal-être allant jusqu’à la volonté d’en finir. Mais justement, ce que je reproche à ce roman, c’est précisément le fait que les différents thèmes sont tous très intéressants, mais pas suffisamment développés. La mère de Matt, par exemple, va de plus en plus mal, on sent qu’elle est détruite par le déroulement des événements, mais le récit, s’il aborde les dégâts infligés à la famille de Matt, n’insiste pas assez à mon goût sur ces aspects difficiles et ne les développe pas suffisamment… En fait, ce roman est trop gentillet. Compte-tenu du sujet, l’histoire aurait mérité un traitement plus musclé : cela n’aurait pas empêché de garder le côté tendre qu’on perçoit déjà très bien. Les chapitres reprenant les textes des messages électroniques que les deux jeunes gens s’envoient (ou hésitent à s’envoyer) mutuellement éclairent d’un jour nouveau le récit lui-même : si Ursula est la narratrice, à la première personne, ces messages électroniques sont le moyen utilisé par l’auteur pour nous faire pénétrer dans l’intimité de Matt, dans ses sentiments. Or Internet, les emails, les blogs, sont utilisés justement par les adolescents pour s’exprimer, comme des journaux intimes, et cet aspect est parfaitement rendu dans ce roman.
Paru aux éditions Gallimard (Folio), 2004. ISBN : 978-2-07-042571-6
mardi 31 août 2010
L'Homme que l'on prenait pour un autre, de Joël Egloff

Autant le dire tout de suite, je n’ai pas du tout été de son avis. Au mieux, les premières pages m’ont fait sourire, mais ne m’ont absolument pas fait rire.
Ce roman est l’histoire d’un homme au visage tellement commun qu’il est sans cesse pris pour quelqu’un d’autre : pour un ancien compagnon de cellule, pour le traître d’une bande de voyous, pour le mari de la voisine du dessous ou l’amant d’une inconnue… Ce roman se laisse lire car il est bien écrit. Tout au long de l’histoire, le lecteur n’a qu’un seul point de vue, celui de cet homme dont on ne connaît pas le vrai nom, mais qui est appelé par les autres « Pierre Simon » ou « Le Pouilleux », ou autre. Le lecteur est ainsi promené d’une rue à l’autre, d’un appartement à la boutique du cordonnier, de la rue à la maison de retraite… sans jamais savoir de qui, finalement, il suit les pas. De ce point de vue, le roman est très bien monté, laissant jusqu’à la fin le mystère sur celui dont on lit les déboires.
Pour le reste, c’est un roman plutôt décevant en ce qu’il ne donne aucun dénouement. Qui est cet homme ? Que s’est-il passé dans son appartement ? Lui a-t-on pris sa vie ? A-t-il pris la place de quelqu’un d’autre ? Est-il tout simplement fou ? Amnésique ?
Les questions se bousculent et restent sans réponse. C’est donc un roman qui interpelle, qui interroge… mais qui, en ce qui me concerne en tout cas, ne restera pas dans mes souvenirs très longtemps, car il sera chassé par une autre lecture que j’espère plus enthousiasmante. Je ne me suis pas ennuyée, non. Mais on m’avait présenté ce roman comme plein d’humour et très drôle, ce qui n’est à mon avis pas le cas. Ceci dit, pour qui aime la loufoquerie, c’est sans doute un roman à lire !
Paru aux éditions Buchet/Chastel, 2008.
Paru aux éditions Pocket, 2009. ISBN : 978-2-266-18431-1
vendredi 27 août 2010
Pourquoi j'ai mangé mon père, de Roy Lewis

L'histoire se passe à la fin du pléistocène, à l'époque où l'homme ne sait pas encore parler, connaît le feu mais ne le maîtrise pas, vit dans les cavernes, mange plus ou moins cru, chasse, et se trouve confronté à la faune terrestre, lions, antilopes, et autres animaux aujourd'hui disparu. Nous sommes ici propulsés dans cette fin de pléistocène et assistons aux efforts du héros, Edouard, pour domestiquer le feu et élever les pithécanthropes au rang d'êtres humains. Edouard est un "subhumain" qui a beaucoup d'idées et beaucoup d'ambition pour sa horde. Il est très inventif, il est aussi cachotier et cherche à élever ses enfants, Oswald, Ernest, William, Alexandre et Tobie, pour en faire des "humains". Pour cela, il n'hésite pas à employer des moyens radicaux, comme aller sur un volcan pour en ramener le feu, au risque de se tuer, va jusqu’à mettre toute sa horde en danger. Outre son récit comique, dont le ressort est essentiellement l’anachronisme du discours, ce roman est une excellente entrée en matière pour qui s’intéresse un peu à l’évolution de l’homme. En effet, les différentes expériences d’Edouard sont extrêmement bien documentées et décrivent d’une manière très précise les découvertes de cette époque : description de la taille d’un silex, passage de l’endogamie à l’exogamie, étapes successives dans la domestication du feu, techniques de chasse, habitat, tous ces aspects de la vie quotidienne et bien d’autres sont décrits de manière vivante et drôle, rendant la préhistoire amusante et rapprochant quelque peu ces premiers hominidés de nous.
On m’avait décrit ce roman comme très drôle. Personnellement, si je n’ai pas ri aux éclats, je me suis malgré tout beaucoup amusée. La lecture est facile, plaisante, drôle effectivement, instructive sans en avoir l’air, et les références à notre monde actuel (à la bombe atomique par exemple) sont vraiment de purs moments comiques. Edouard semble avoir une conscience aiguë de l’avenir de l’homme, il est une sorte de visionnaire. Ses fils développent chacun des aptitudes particulières, pour la chasse, l’art, et autres, et donnent là les prémisses de l’évolution de l’homme, qui par la suite découvrira la domestication des animaux jusque là sauvages, inventera les peintures rupestres, développera des techniques de chasse de plus en plus élaborées, ou encore explorera son inconscient, ses rêves, finira par croire en une puissance supérieure (Dieu ?) et ensevelira ses morts. Ce roman est empli de personnages typiques, comme l’oncle Vania, réactionnaire qui milite pour le retour aux arbres, ou encore Griselda, la belle-fille, fine tacticienne, qui donnent au récit une atmosphère à la fois drôle et enthousiasmante.
C’est donc ici une jolie découverte, qui, s’il ne fait pas partie de mes romans préférés, mérite le détour.
Traduit de l'anglais par Vercors et Rita Barisse, Préface de Vercors.
Paru aux éditions Actes Sud, 1990.
Paru aux éditions Pocket, 2004. ISBN : 978-2-266-14307-3
jeudi 19 août 2010
Kétala, de Fatou Diome

Fatou Diome est Sénégalaise, immigrée en France, à Strasbourg. Pour moi, son roman a donc le double goût de l’exotisme de l’Afrique et du Sénégal en particulier, et celui de l’Alsace, où se déroule une bonne partie de l’intrigue. Fatou Diome mêle en effet dans son récit la tradition à la fois orale et coutumière de son pays d’origine, et la modernité de son époque, de son pays d’adoption et des modes de vies d’ici.
Mémoria est morte. La tradition au Sénégal, à la mort de quelqu’un, est de l’enterrer très vite (dans les heures qui suivent son décès). Et huit jours après, a lieu le Kétala, l’héritage : les proches du défunt se partagent ses biens, après les huit jours de deuil prescrits par la tradition et la religion (le partage est fait par l’imam local). Tout le roman se déroule pendant ces huit jours d’attente, et le lecteur est plongé au cœur même de la vie de Mémoria, à travers la parole et les questionnements de ses meubles, vêtements et objets personnels. Dans la perspective de leur dispersion, les meubles et objets, en effet, sont tristes d’être séparés. Sous la présidence de Masque, hérité des ancêtres de Mémoria et représentant la sagesse des anciens, les membres de cette assemblée peu commune vont donc, au fil de ces huit jours, égrener leurs souvenirs de la défunte, afin de reconstituer ensemble la vie de leur maîtresse. Le lecteur se retrouve donc spectateur de cette assemblée, riche de l’histoire et des souvenirs de Mémoria. Nous assistons donc à sa naissance, à son enfance, sa jeunesse, son mariage, son exil, sa vie en France, sa déchéance, sa mort… à travers les questionnements, les souvenirs et les récits de Montre, Canapé, Ordinateur, Coumba Djiguène, Chasseur, Masque, Assiette, Mouchoir, Marinière…
Ce roman aurait pu être morbide, larmoyant, trash… Il n’en est rien. Il aurait pu aussi être pudibond, mièvre, à l’eau de rose… mais ce n’est pas le cas non plus. Avec beaucoup de finesse, de retenue, de pudeur, de tendresse, et surtout de poésie, l’auteur nous fait entrer dans les affres et les souffrances de cette jeune femme. La seule chose que je reproche à ce roman, c’est sans doute la plus grosse ficelle du récit, à savoir les interventions de Mouchoir, trop idiot pour être honnête, qui servent immanquablement à provoquer une bagarre entre les meubles et à mettre fin provisoirement au récit, pour pouvoir passer au chapitre suivant. C’est plutôt drôle la première fois, c’est très lourd par la suite. Mais ce petit défaut est compensé en grande partie par la qualité du récit lui-même, la complexité des faits et des sentiments de Mémoria, et l’analyse fine des comportements humains, vus par les meubles et objets qui, eux, n’ont qu’une vision partielle, voire parcellaire, de la vie de leur propriétaire. Leurs questionnements mettent le doigt sur l’absurdité de certains de nos comportements, et permettent aussi de voir à quel point nos vies sont compliquées alors que tout pourrait être si simple. Mais il s’agit là de la nature humaine, magnifiquement décrite par l’auteur.
Ce récit laisse un goût étrange : il est empreint d’une sorte de sagesse millénaire, que l’on sent transmise par les générations qui ont précédé celle de Fatou Diome : l’art de la transmission orale transparaît dans tout le roman, et pas uniquement du fait de cette « assemblée » des meubles, reflet de l’assemblée des hommes sous l’arbre à palabres, au village. Le lecteur sent en effet dans le discours que l’auteur est à la fois l’héritière des sages, des anciens et des traditions de son pays, mais aussi un exemple de réussite d’intégration dans son pays d’adoption, puisqu’elle a su allier son héritage et la culture européenne d’aujourd’hui. Mais le ton dans certains passages du roman laissent un goût étrange, comme si la maturation de l’auteur n’était pas accomplie : j’ai en effet parfois eu l’impression de lire des disputes entre gamins, qui m’ont passablement énervée à la lecture (en particulier les interventions de Mouchoir et d’autres). Est-ce le ton employé ? La répétition du procédé ? C’est plutôt difficile à analyser. En tout cas, ce roman est malgré cette petite réserve une véritable découverte, qui se lit de bout en bout sans le moindre problème, dans une belle langue, qui fait danser les mots et joue avec leur poésie.
Paru aux éditions Féryane, 2006. ISBN : 978-2-84011-731-5
Paru aux éditions J’ai lu, 2007. ISBN : 978-2-290-00154-7
dimanche 15 août 2010
Best Love Rosie, de Nuala O'Faolain

J’ai emprunté ce roman, et attendu un certain temps avant de l’ouvrir. J’avais avant des lectures utilitaires que je me suis dépêchée de terminer, histoire de pouvoir savourer celle-ci. J’avais déjà lu, du même auteur, "L’Histoire de Chicago May", enquête de type journalistique sur la vie de cette prostituée américaine, que j’avais trouvée passionnante.
Dans ce roman, le dernier écrit par Nuala O’Faolain avant sa mort, c’est une plongée dans l’Irlande profonde à laquelle le lecteur est convié.
Rosie a la cinquantaine et se pose beaucoup de questions sur cette nouvelle étape de sa vie. Elle sort en effet d’une relation désastreuse avec Léo ; elle a beaucoup voyagé dans le passé, pour son travail essentiellement ; elle revient aujourd’hui au pays auprès de Min, sa tante, qui l’a élevée et a pris soin d’elle et de son père jusqu’à la mort de celui-ci.
Nuala O’Faolain nous entraîne donc ici dans la vie de ces deux femmes, Rosie et Min, et de tous les changements que le retour de Rosie provoque : Min, à la surprise de sa nièce, réalise enfin ses rêves et devient indépendante alors même que Rosie était rentrée pour elle, inquiète pour sa santé. Rosie, quant à elle, se lance dans un projet de livre, mais en profite pour tenter de trouver les réponses à de nombreuses questions qu’elle se pose sur son histoire familiale, ses liens avec son père, la vie de sa mère, la présence de Min dans cette équation…
Finalement, il se dégage de ce roman un sentiment d’apaisement, de grande sérénité, malgré les bouleversements majeurs que vont connaître ces deux femmes. Tout se passe en définitive comme si elles prenaient enfin le temps de se connaître, de se retrouver, et surtout de se voir enfin elles-mêmes, d’assumer réellement qui elles sont et ce qu’elles veulent faire de leur vie. C’est donc un roman sur l’acceptation, de soi, de son âge, des évolutions dans sa vie, un livre sur le vieillissement aussi, et une très belle peinture de l’Irlande contemporaine. Le discours est fluide, les mots empreints de poésie, l’histoire et la vie de Rosie se déroulent sous les yeux du lecteur qui contemple avec elle la maison de l’enfance de Min, la mer qui s’étale au loin… La description du décor que fait l’auteur est magnifique, à la fois brute et forte comme l’est l’Irlande, et emplie de toute la tendresse de l’auteur pour son pays, tendresse qu’elle sait admirablement transmettre au lecteur.
Pour aller plus loin : cliquez ici.
Paru aux éditions Sabine Wespieser, 2008. ISBN : 2-84805067-5
Paru aux éditions 10/18, 2010 (Domaine étranger). ISBN : 978-2-264-04994-0
mercredi 11 août 2010
Au Bon Roman, de Laurence Cossé

Paru aux éditions Gallimard, 2010 (Folio). ISBN : 978-2-07-041998-2
samedi 7 août 2010
Fever, de Leslie Kaplan

Ce roman est un livre sur un crime. Mais ce n'est pas un roman policier. Il n'y a pas besoin d'enquête pour que le lecteur apprenne qui est le coupable, il le sait depuis le début. En revanche, ce qui pose question, c'est le "pourquoi", la question du mobile qui a motivé le meurtre.
J'étais très curieuse de lire ce livre, qui abordait l'histoire dans le sens inverse de celui de mes habituelles lectures. Mais lorsque je suis arrivée à la fin de la lecture de ce roman, mon impression a été très mitigée.
Ce n'est pas un roman policier. Il y a bien meurtre, mais pas d'enquête, pas de suspense, rien qui tienne le lecteur en haleine, en tout cas pas dans les deux premiers tiers de l'ouvrage. Dans le dernier tiers, un parallèle osé entre l'acte des coupables et les collaborateurs français du régime de Vichy, leur rôle dans la déportation de milliers de Juifs semble donner un début de réponse : les deux jeunes coupables sont-ils héritiers malgré eux de la culpabilité du grand-père de Damien, que l'on finit par supposer "collabo" ? La folie meurtrière est-elle héréditaire ? Malheureusement, à la fin, il n'y a toujours pas de réponse... en tout cas rien de clair, de tangible. Les hypothèses ne sont même pas suggérées : il revient totalement au lecteur de s'imaginer ce qui a pu amener ces deux jeunes gens à fomenter un tel crime. Ce livre est donc décevant pour qui s'attend à comprendre ce qui pousse un criminel à agir. Bien entendu, des indices sont disséminés tout au long du livre et le lecteur apprend à mieux connaître les différents protagonistes et les éventuelles motivations qui peuvent les habiter. Mais tout ceci laisse un goût d'inachevé. Le lecteur attend plus. Et cette impression est renforcée par la présence d'un personnage très secondaire, une jeune femme prénommée Zoé. Elle apparaît de temps en temps dans le récit et semble être l'un des protagonistes importants de l'histoire. En effet, les chapitres où elle intervient donnent au lecteur le sentiment qu'elle est "la" personne qui pourrait le représenter dans l'histoire, avec sa vision de ce qui s'est passé et sa volonté de connaître la vérité. En définitive, elle est très transparente, spectatrice du drame. Elle n'est pas le catalyseur que le lecteur attend, elle n'est finalement qu'une spectatrice parmi d’autres, à la différence près qu’elle a un prénom. La question que l'on se pose alors, c'est "que vient-elle faire dans cette histoire ?"
Au niveau de la forme et du style d'écriture, le roman heurte quelque peu : l'écriture est hachée, les phrases rapides, vives, répétitives, donnant à la fois un sentiment d'urgence et de piétinement. Le parti-pris de mêler sans repères narration et dialogues perturbe la lecture, puisqu'il faut parfois relire certains passages pour comprendre si on est dans un dialogue ou dans la tête du personnage. Ceci dit, ce style narratif "fonctionne", si l'ambition est de mettre le lecteur mal à l'aise. Et à la limite, il exprime presque mieux que les mots l'enlisement mental dans lequel se trouvent les deux jeunes criminels dont on suit l'évolution du début à la fin du livre.
Cette chronique n'est donc pas un "coup de cœur", mais un article très mitigé sur ma vision de ce roman. L'intérêt, à mon avis, réside surtout dans ce qui est écrit entre les lignes. Ce qui est suggéré plutôt que ce qui est réellement dit. Il est question en filigrane de la folie, du secret de famille, des non-dits, des apparences. Beaucoup d'indices font penser que le jeune Damien, qui est à l'origine du meurtre, devient totalement fou après son acte. Mais les apparences sont telles qu'il semble parfaitement normal. La question que l'on peut se poser après la lecture de ce roman, c'est aussi : "Qu'est-ce qui, finalement, sépare la folie de la normalité ?" "A partir de quand devient-on fou ?" Il n'y a ni remords, ni regrets, ni doute, ni compassion. Si le lecteur n'était pas dans la tête des meurtriers durant tout le roman, ceux-ci deviendraient à ses yeux des monstres. Et c’est peut-être justement l’effet recherché ? Redonner leur humanité à des monstres dont on sait pertinemment qu’ils sont aussi des êtres humains ? Oui, l'impression que laisse ce livre est étrange, car il bouleverse les codes d'écriture habituels, mais en tout cas, il ne laisse pas indifférent.
Ce livre est le cinquième volet de la série romanesque "Depuis maintenant", qui comprend également : "Miss Nobody Knows" (1996), "Les Prostituées philosophes" (1997), "Le Psychanalyste" (1999) et "Les Amants de Marie" (2002).
Paru aux éditions P.O.L., Paris, 2005. ISBN : 2-84682-053-8.